J’aimerais revenir sur l’état de dépendance et sur le fantasme qui le créé, et nous empêche d’acter ce qui n’est pas ok pour nous.

Il y a 1 an, j’ai rencontré un homme qui est tombé très très vite amoureux de moi. Instantanément pourrait-on dire. J’ai plus tard appris qu’il tombait, comme ça, très vite amoureux. Je n’en tire pour l’instant aucune conclusion, je sais pas ce que ça signifie.

Je n’étais pas amoureuse. On s’est vu pour discuter de son mal être. Je lui avais dit qu’il y avait plus à obtenir que a minima ne plus boire. Et c’était l’objet de notre rencontre. En discuter. Expérimenter. Déjà, je préparais ma super séance de Yoga Kundalini et ma respiration Wim Hoff.

A ce moment là, il avait a priori renoncé à son sentiment amoureux, pour se concentrer sur cette part de « vachement plus à obtenir ». Mais pendant une pratique de présence tantrique, j’avais noté qu’il était un peu mal à l’aise. Je n’avais pas su comment l’interpréter. Dans cette pratique, on se regardait longtemps dans les yeux. C’est comme ça.

Quand après cette 1ère rencontre il est parti, il m’a envoyé un email le lendemain. Dans cet email, entre autre chose, il me disait « Bordel que tu es belle ». Lui si timide lors de cette rencontre, affirmait et jurait. Puis « Ta peau est une piste d’atterrissage pour baisers ». Sans doute que cette phrase est du recyclé, je ne sais pas. Les deux m’ont bouleversée. Il y avait une intensité dans cette confession détachée de toute attente par ailleurs (ah l’intensité sans l’attente…), puisqu’il savait que a priori, c’était mort d’avance. C’était donc gratuit et beau.

Ce que j’interroge ici, c’est le début du fantasme. Je rencontre un homme. Il ne me dit rien. Que se passe t-il pour que je démarre, ou plutôt mon corps démarre avec ces quelques lignes ? Car après ça, mon corps a démarré grave. Grosse montée énergétique. On est aimée, et on veut être touchée. Et au moment où je l’écris, je comprends ce qui s’est passé. Cette intensité reflétée dans les mots, c’était la promesse de l’intensité énergétique dans le toucher. L’intensité dans le désir. L’énergie ne s’embarasse pas de relations ou de compatibilité. Elle est là quand elle est là. Sacrée elle…

Et il me revient tous ces hommes, ou garçons, souvent des copains à mon frère, qui tombaient amoureux facilement, à peine m’avoir vue (comme une image parallèle au féminin de mon frère qu’ils adoraient), et leur amour entier et brulant, non réciproque, me mettait en émoi, sans que je puisse y faire quelque chose, sans que j’accepte d’y faire quelque chose, avec beaucoup de culpabilité et de frustration en même temps.

Et je réalise que l’appel, alors, c’était cette intensité énergétique qui donne la promesse d’une vraie vibration dans la rencontre, dans le toucher. Tous les mecs amoureux de moi ne suscitaient pas le même émoi en moi. Il fallait vraiment une énergie palpable. Une vibration. Une intensité dans le regard, dans l’émotion.

Je reviens sur mon histoire.

Nous nous sommes revus la semaine suivante. Cette séance avait bien fonctionné parce qu’il était nettement plus détendu que la semaine d’avant. Nous nous étions dit que nous restions amis, mais mon corps me disait pas la même chose. Je savais pas trop quoi faire de ça. Par ailleurs, je ne me sentais pas « en amour ». C’était physique.

Finalement, nous avons passé la nuit ensemble. C’était une bonne idée.

Dans la relation qui a commencé à se nouer entre nous, j’ai vécu :

  • Des moments d’intimité extrêmement intenses et plein d’amour
  • Des moments de malaise, d’angoisse, que je n’arrivais pas à expliquer,
  • Des forts moments de détachement de mon côté, de fuite pourrais-je dire, où il me fallait partir, et vite. Si je restais, je m’effondrais (sur moi). Je ne me sentais plus accueillie, plus aimée, plus respectée. Et c’était impalpable.
  • De forts moments de souffrance de son côté, quand il me voyait me détacher, le quitter parfois
  • Quand je le quittais, je ne souffrais pas tant. Mais j’aimais les moments de présence dans ses yeux. Et mon corps, mon Dieu, était addict. J’avais en plus pratiqué beaucoup d’énergétique dans la dernière année, j’avais eu une sorte de montée de kundalini qui avait activé mon 2ème chakra (peut être le premier aussi, je sais pas). Bref, après quelques échanges et un « viens » de sa part, je venais. Et c’était reparti pour un tour.

Ce qui m’intéresse dans cet article, c’est de déminer l’appel du corps, donc de l’âme. Que veut-elle si fort que on y va malgré le truc qui fait que ça ne va pas, mais qu’on oublie, nie et ré-oublie pour aller dans cette intensité ?

Quoiqu’il se passe, il y a cette confrontation des voiles et des sensibilités, des blessures, qui nous fait frotter les uns aux autres, particulièrement quand il y a des attentes, de la pression énergétique, de la peur (que ça ne marche pas, de ne pas être assez aimé, etc).

La relation amoureuse est comme une spirale. On joue la partition de nos blessures, ici le manque d’amour, ici le manque de présence, ici le manque de reconnaissance. L’autre est parfaitement choisi pour nourrir une part en besoin à l’intérieur de nous (ici pour moi l’intensité énergétique), et en même nous priver de la chose la plus essentielle dont nous avons besoin, ici la présence pour moi. Nous sommes addict à l’intensité, et malheureux que notre besoin de fond ne soit pas nourri. Mais, nous restons, nous nous accrochons. Nous laissons ce besoin en déshérence, comme il l’a été probablement dans notre enfance, habitué que nous sommes à ce qu’il ne soit pas respecté.

Cette fois-ci, c’est nous qui ne le respectons pas. Cette part qui demande de l’attention en nous, une autre part en nous la traite mal. Elle lui demande de se tenir, d’être cool, de se détendre, de se détacher. De faire avec.

Cette part qui demande de l’amour plein et entier, une autre part lui dit de patienter, qu’elle ne devrait pas être si exigeante, qu’elle a un problème.

Au final ça donne quoi ? Nous débarquons avec nos âmes de princes et princesses, nous tombons amoureux du prince que l’on devine à l’intérieur, de son intensité, de sa lumière, mais nous ne prenons pas soin de nos besoins, en particulier du besoin blessé, nié dans l’enfance. Nous le maltraitons en l’ignorant. Nous maintenons la relation dans sa prise énergétique : oui ignore moi, oui parle moi mal, ou ne me comprend pas, oui ne me donne pas un amour plein et entier, parce que probablement, là à l’intérieur, je ne le mérite pas. Où je suis trop en demande. ou je n’ai pas tant besoin. Puisqu’on me la déjà signifié, enfant.

Si, nous en avons besoin. Qui va donner de la reconnaissance à ce besoin, si ce n’est nous ? Peut-on attendre indéfiniment que l’autre en face nourrisse ce besoin ? Ou va t-on en prendre acte et fermer la porte si nous ne sommes pas nourris par ce dont nous avons besoin ?

Je ne sais pas si la prise énergétique s’éteignant, en reconnaissant la légitimité de notre besoin, en en prenant acte, la relation change et nous sommes finalement mieux nourri, ou si la relation s’arrête.

Je vois que dans la demande d’amour (celle que je vois chez les hommes souvent), il y a beaucoup de colère quand cette amour n’est pas donné. Peut être parce que c’est une histoire d’hommes et que la souffrance est pas loin de la colère chez un homme.

Me concernant, le manque de présence, d’écoute, débouchent sur une profonde tristesse, une panique intérieure… et un détachement amoureux. Je me mets à distance. Je craque physiquement. Mais mon cœur est à distance.

Je réalise d’ailleurs que mes emballements amoureux ont toujours été en lien avec une présence. Une attention de quelques secondes. Un regard. Sans qu’il n’y ait relation. Donc sans attentes de l’autre. Juste quelques secondes d’intense présence.

Un jour, je suis tombée amoureuse d’un monsieur (il avait bien 65 ans) pendant une retraite de méditation, juste par les quelques secondes avec lesquelles il m’a regardée. C’était un regard vrai, soutenu et plein d’amour. Ma dépendance s’est réveillée instantanément. Je voulais être aimée et j’ai cru être aimée. Il me dit plus tard « you are fully loved ». Il ne parlait pas de lui. Mais je n’ai pas saisi sur le coup. De façon floue. Cette phrase me bouleversa. Sans savoir pourquoi. Are you ? Ou qui ? Sur le coup j’ai pleuré. Je ne comprenais pas ce que ça faisait résonner en moi. Mais c’était profond.

J’ai surtout senti ce besoin d’être pleinement aimé et que personne ne pouvait pleinement m’apporter. L’amour nous vient par bribe, par moments. Si nous voulons l’amour inconditionnel, c’est vers nous-même et vers la transcendance qu’il faut se tourner. Et c’est en captant cet amour infini que l’expérience de l’amour ici bas nous devient supportable. Sans nous mettre dans des affres de manque ou d’insuffisance. Juste des intensités qui se donnent. Et que l’on prend. Comme un bonus. Dans l’instant présent.

C’est fou l’amour, non ?

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