Dans cet article, je vous partage une petite réflexion qui m’est venue suite à l’expérience d’une cliente dont j’ai contemplé l’accrochement à tout prix à une situation clairement toxique pour elle, là où j’aurais moi-même expédié cette même situation en 3 coups de cuillères à pot.
Et ce qui m’est venu, c’est comment l’évidence vue de l’extérieur est tellement inopérante à l’intérieur quand nous sommes « saisis » par une situation, au demeurant anecdotique pour n’importe qui d’autre, qui appuie pile poil là où nous avons mal. Comment nous devenons alors aveugle à ce qui se joue, et que nous verrions si facilement s’il n’y avait pas cet effet d’écho qui nous fait entrer officiellement dans notre petit tunnel émotionnel et mental dont plus rien de rationnel ou de logique ne pourra nous faire sortir.
Merci à elle, et hop en avant !
La malédiction des situations récurrentes
Les situations difficiles et récurrentes ne sont pas tant une malédiction dont nous serions victimes que des situations dysfonctionnelles qui se présentent à nous de façon récurrentes et auxquelles on ne dit pas non parce que nous ne voyons pas qu’elles sont dysfonctionnelles.
Nous ne le voyons pas car ça nous appuie pile poil là où nous avons mal, et cela nous rend centré sur notre insuffisance présumée. Et au lieu de nous dire : « ah ben non, grave pas », comme le ferait facilement une personne qui n’aurait pas d’écho émotionnel, on s’y accroche avec toute l’énergie du désespoir pour prouver qu’on peut réussir dans cette mission impossible.
Quelques exemples.
Je n’ai pas été écoutée étant enfant. Quand je parle de moi à quelqu’un qui ne m’écoute pas, ou pas bien en tout cas, je ne prends pas acte. Et là où mon frère (qui n’a pas la même blessure) se dit probablement et facilement : il m’écoute pas çui-là, il m’énerve, salut », je plonge de mon côté dans une tension intérieure intense. La tension intérieure me rend incapable d’expliciter mon malaise. Je tente vainement de me faire entendre précisément là où ça ne veut pas écouter.
Mon problème n’est pas de ne pas être écoutée. Mon frère aussi peut ne pas être écouté. Mon problème est que je ne fuis pas. L’écho émotionnel intérieur m’empêche de voir que ça ne PEUT PAS m’écouter en face. Il est même probable que je ne vois carrément pas que ça n’écoute pas. Car dans le tumulte intérieur qui monte, on ne voit tout simplement pas en quoi la situation nous pose problème. On la subit énergétiquement, c’est tout.
Je choisis de vendre mes massages sur groupon. Une angoisse profonde et diffuse m’étreint à mesure que j’enquille les massages sur les mois. Mais je ne comprends pas pourquoi je me sens mal. Là où ma pote masseuse aurait dit direct : « non mais un massage à 30 € ? Grave pas », je m’accroche à la situation sans comprendre d’où vient mon malaise. L’aveuglement vient d’une émotion sur laquelle cette situation appuie. Manque de reconnaissance et course à la reconnaissance. Là où pile poil ça appuie, je ne suis plus capable de reconnaître que ce n’est pas ok pour moi. Je m’accroche, et je force. Alors que c’est précisément l’inverse qui me sauvera : dire non.
B. rencontre une situation professionnelle où elle travaille avec une femme, L., qui va lui montrer de la condescendance et la dévaloriser de façon subtile (c’est toujours subtil). B. peut vivre de façon répétée des interactions humiliantes ou dévalorisantes avec L., sans se dire que c’est l’autre qui a tort, simplement. Enfin elle l’envisage mentalement, sur invitation, mais revient à son postulat de croyance. Elle essaye de « mériter » mieux. De l’extérieur, on voit bien que L. créé un système avec B. (parce qu’elle a ses propres blessures), et qu’elle est juste toxique. Mais pour B., ça touche précisément un point extrêmement sensible chez elle. La tension intérieure dans laquelle elle plonge l’empêche d’accéder à l’évidence. Elle s’accroche. Elle le prend personnellement. Elle ne dit pas non. Elle subit.
Mettez un pote à la place
Une situation n’est difficile que parce qu’on la prend, quand notre copain ou notre collègue aurait déjà dit depuis longtemps : fuck le truc. On croit être insuffisant. On s’accroche. En fait n’importe qui qui n’aura pas cette « hypersensibilité » à cet endroit précis aurait déjà pris acte et dit Bye Bye.
Mettez un pote que vous estimez, ou Ghandi si vous voulez à votre place, qu’est ce qu’il dit ? Probablement : non pas comme ça, ou non, carrément pas.
Si vous n’arrivez pas à faire le transfert, inversez : imaginez que vous avez un ami qui vit votre situation. Ne mettez rien de vous dans cette situation, inventez une similarité. Il vous demande de l’aide. Que lui dites-vous ?
Vous voyez, vous lui dites que c’est pas pour lui. Mais lui ne vous entend pas. Pourquoi ? Parce que vous pouvez lui sortir toute la logique du monde, toute la rationalité existante, ce qui travaille en lui pile poil à ce moment, c’est pas la situation mais l’écho émotionnel auquel ça le renvoie. Et c’est intense… et inconscient.
L’émotion originelle et les encaissements successifs
Chaque situation, chaque blocage, chaque difficulté provoque une émotion, une tension intérieure en nous qui n’est que l’écho d’une émotion originelle d’enfance. Il y a comme une superposition de deux images, celle de la situation, filtrée, à celle d’une situation traumatisante originelle : rejet à l’école, dénigrement des parents, humiliation des profs, amour contre obéissance, etc.
Cette émotion, non libérée, c’est à dire non parlée, non autorisée, non « expliquée », donne suite suite à une longue série d’encaissements car l’émotion originelle nous aveugle, elle nous empêche de voir la réalité, c’est à dire que cette situation, ce travail, cette relation ne sont pas pour nous, pas ok pour nous. Mais comme nous sommes aveuglé par la tension intérieure de l’émotion originelle, nous prenons. Nous croyons que nous ne sommes pas assez. C’est le contraire : la situation n’est pas ok pour vous.
Avec l’accumulation des situations, sans jamais libérer l’émotion originelle, on commence à devenir hypersensible à cette situation récurrente. On le devient d’autant plus qu’on n’est pas nourri par ailleurs et que notre capital énergétique d’encaissement faiblit à vu d’oeil.
On le voit bien chez les enfants, ils sont capables d’encaisser en restant détendu la tension de l’autre ou une négation d’eux-mêmes et d’être en ouverture juste après. En arrière plan, probablement que ça travaille, mais énergétiquement, ils ont un vrai capital.
Pour nous pauvres pêcheurs, c’est une autre histoire. Passé 40 ans, nous sommes sur les rotules. Ca craque de toute part.
Ne pas être dupe du mental qui tourne autour de la situation
C’est intéressant d’observer avant de faire le taf (se libérer émotionnellement/énergétiquement) combien le mental se saisit de la situation et nous raconte une histoire terrible sur nous. C’est intéressant de prendre conscience que nous prenons pour acquis la terrible image que notre mental nous renvoie : je suis nulle, je ne mérite pas, je suis maudit, je ne suis pas assez, je ne fais pas assez bien, etc. Tout en étant mégalomaniaque par ailleurs pour certains, ça n’empêche en rien, et je pourrais même dire, l’intensité là est en rapport avec l’intensité là-bas ! Nous le prenons pour acquis comme si le mental, c’était nous. Et surtout comme si le mental ne se trompait jamais (vu où il nous a emmené dans notre vie, c’est hyper discutable !!).
Le mental est également inopérant dans la résolution de la situation. La complexité de la pensée, les faits, les spécificités des situations, « oui mais il m’a dit ça » ou « elle a fait ça », tout cela ne sert à rien (et je sais combien c’est énervant quand on est habitué à faire confiance à son mental et à gérer des faits d’en être réduit à ce constat). On peut décortiquer la situation dans tous les sens, nous sommes de toute façon aveuglés et non centrés sur la réalité. La seule chose à faire est de faire sauter d’abord l’émotion originelle.
Si nous sommes assez malins pour ne pas être dupe de notre mental, et savoir que la situation difficile que nous vivons est probablement due non pas à notre insuffisance comme notre pensée nous le raconte, mais à un blocage émotionnel, nous allons faire ce qu’il faut faire : prendre du recul avec les pensées obsédantes et délétères et trouver quelqu’un pour nous aider à libérer l’émotion : une psy, une énergéticienne, un coach, etc.
Si on a un peu d’expérience, on peut aussi opérer la plongée tout seul.
Que vous décidiez d’opérer la plongée intérieure par vous-même (voir La Bulle) ou en présence (avec moi si vous voulez, soyons fou), soyez sûr d’une chose : l’émotion que vous ressentirez sur la situation en cours ne sera que l’écho d’une émotion beaucoup plus profonde de l’enfance. Il vous faudra alors beaucoup de compassion, de respect et d’attention pour cette émotion. Car la seule personne à pouvoir lui donner ce qu’elle n’a pas reçu en temps et en heure… c’est vous.
Pratique d’observation :
Observez si chaque situation difficile de votre vécu et demandez-vous si votre meilleur ami ou toute personne qui n’a pas cette blessure (imaginez Ghandi si vous séchez) n’aurait simplement pas dit bye bye dès le début. Faites une liste de 3 situations. Oui ou non. Qu’aurait fait Ghandi ?
Imaginez que la situation que vous vivez actuellement, la situation difficile, ne soit pas une situation qui parle de votre insuffisance mais parle au contraire de votre incapacité à voir qu’en face, c’est pas à la hauteur (en clair, ça ne vous va pas : ça fait pas le taf, c’est pas authentique, ça n’écoute pas, c’est toxique, ça créé un système, ça dit blanc mais ça dégage noir, ça veut pas, bref, ça peut pas). Oui je sais, c’est un énorme effort mental. Mais faites-le. Que vous manque t-il finalement dans cette situation/relation ?
Bref, imaginez que ça ne soit pas « capable » en face, et que vous êtes bien la dernière personne à ne pas en avoir conscience.
Et si en fait, ça n’est pas capable en face de vous, qu’allez-vous faire ?
Vous avez entraperçu l’arnaque de votre mental. Il vous raconte une fausse histoire. Mais il y a quand même cette émotion à la base qui a besoin d’être accueillie… Sinon vous relongerez. Encore 🙂
Pour en savoir plus sur la démarche : Faire l’expérience de soi