La matrice, c’est ce que véhicule l’inconscient collectif et l’ADN de notre société depuis des centaines d’années, voir des milliers d’année, et qui nous imbibe depuis l’enfance, à travers nos parents, l’école, notre environnement, nos interactions sociales.
La matrice sociétale définit l’humain. Elle définit ce qu’est un humain : ses besoins, sa nature, et contribue à structurer la réponse à ces besoins. Ainsi, dans notre société, il est dit que la sécurité, l’alimentaire, avoir un travail, de la stabilité, bref, de la sécurité est prioritaire.
Notre société est extrêmement axée sur cette sécurité, et tout ce qui en découle : la stabilité financière, la rationalité (tout ce qui n’est pas démontré n’existe pas), le savoir « certifié » par des experts, l’évitement du risque et donc la disqualification de tout ce qui le représente, la responsabilité individuelle à la place de la responsabilité sociétale, la peur de ce qui sort du cadre, la peur des émotions, de ce qu’on ne peut contrôler, la peur de ce qui peut contredire ce même (fragile) ADN.
Cette priorité à la sécurité pourrait être une voie possible pour concevoir l’humain, mais, en parallèle, l’état de notre société, de nos enfants et adolescents, de notre environnement, de notre santé, de notre bien-être psychique, ce dernier étant a priori un indicateur du bien-être humain, se dégradent depuis des décennies (la France est devenue le plus gros consommateur d’anti-dépresseurs et d’anxiolytiques du monde, y compris pour les jeunes).
Il semble donc que le refoulement de l’émotion, puisque telle est la définition de l’anxiété, ne puisse être une solution à long terme. Mais notre société est-capable de recevoir le message de l’émotion ? Car si l’émotion est le résultat du frottement entre le soi (l’anima) et l’identité adaptée (le persona), et que cette dernière n’est qu’une émanation de notre matrice sociétale installée en chaque individu, chaque émotion parle donc de la matrice ?
Oui.
La matrice sociétale vs l’humain
Qu’a t-elle compris de l’humain ? A t-elle bien saisi les besoins fondamentaux d’un humain et les nourrit-elle vraiment ? Qu’est-ce qui nous amène à ne jamais nous poser la question du pourquoi (responsabilité sociétale) quand l’humain défaille (quelle que soit la défaillance : violeurs ou agresseurs, dépressions, phobies scolaire, pulsions destructrices, abus de pouvoir, addictions, bipolarité, burn-out, suicides, consommation d’anxiolytiques et anti-dépresseurs, stress et anxiété, maladies chroniques, etc) pour rester circonscrit au constat de la défaillance individuelle ?
Nous évitons de ce fait de nombreuses questions que nous aurions bien du mal à résoudre tant la force d’inertie de notre société nous empêcherait de rectifier le tir : est-ce que le format de l’école joue sur l’état d’être des adolescents ? Est-ce que la passion du professeur influe sur le processus d’apprentissage ? Est-ce que le lien de subordination des salariés fait sens pour les humains ? Est ce que confier nos bébés de 2 mois et demi à des assistantes maternelles les maintient dans le lien d’attachement et d’amour dont ils ont besoin ? Dans quelle mesure la société est-elle responsable quand un enfant devient, adulte, un violeur, criminel ou junky ? Quels besoins humains n’ont pas été nourris quand des adolescents sont en phobies scolaire ou en dépression, des salariés en burn out et des personnes en hôpital psychiatrique ?
Or, nous pourrions nous poser la question de la source. Les disfonctionnements sont-ils individuels ? Est-ce génétique, pas de chance, un mauvais environnement ? Ou ces manifestations peuvent-elles être le signe que des besoins humains ici n’ont pas été nourris, et c’est de la responsabilité de notre société de se poser la question du nourrissement de nos besoins humains. Et pas seulement de s’assurer de notre sécurité matérielle et physique et de l’état de notre niveau de connaissances ou de réussite sociale.
Le traitement allopathique
Notre société s’en tient au traitement des symptômes. La médecine, la justice, l’ensemble de notre structure est axée sur l’effacement des symptômes. Nous cassons le thermomètre. L’humain est envisagé de façon mécanique. Et la cause réelle des dysfonctionnements devient plus ou moins tabou. Nous devons aller bien. Nous devons être forts, en confiance, réussir. La défaillance est un objet de honte. Une sorte de disqualification individuelle dont le groupe ne prend jamais la responsabilité.
Au contraire, la défaillance individuelle inquiète. Elle menace l’harmonie et le bon fonctionnement collectif. On craint la contagion, on s’en éloigne donc. Elle est généralement réglée par une mise à l’écart de celui qui faillit. Il ne nous reste plus qu’à prier pour ne pas faillir. Et à nous accrocher à notre persona…
En priorisant le traitement des symptômes, notre société n’aborde jamais le traitement des besoins essentiels de l’humain. Et on peut le comprendre, parce que chercher la cause est une bombe à retardement. Elle peut tout remettre en cause : l’école, le lien entre les gens, notre sacro-sainte rationalité, la médecine, la vieillesse, la science, la religion, le travail, nos habitations, nos villes, nos loisirs, notre environnement, notre façon d’être à l’autre.
Matrice et hypersensibilité
La matrice sociétale nous demande de nous adapter à une humanité qui n’est pas nous. Elle crée un monde pour humains qui ne correspond pas vraiment à ce qu’est être humain. Ce faisant, en déroulant son offre et en nous y intégrant, elle génère un malaise en nous. Le malaise se manifeste par étapes. A l’adolescence. Puis à la quarantaine. Entre, nous avons les phases d’adaptation.
Il serait difficile d’imaginer, pour un enfant, que tout ce qui parait bizarre, pas juste ou inutile puisse être effectivement dysfonctionnant sur le plan humain. D’autant plus que personne ne semble le voir. C’est donc sur lui, sur nous, que le doute s’installe, d’autant plus si on se pose des questions : je devrais être ok avec ça, je ne devrais pas ressentir ça, il n’y a pas de problème à ça, donc je ne suis pas normal, donc je suis fragile, insuffisant, torturé, trop sensible… Bref, ce qui fait notre humanité devient le problème. Ceux qui s’adaptent par priorité sécuritaire sans que le soi freine des 4 fers échappent à cette vague de doute intérieure. La priorité les sauve.
Pour les hypersensibles, la priorité n’est pas conscientisée. Elle est vécue comme un échec.
Dans notre volonté de nous intégrer, de faire partie du tout, d’être « avec » les autres, nous sommes prêts à beaucoup, inconsciemment. Nous tentons comme nous pouvons de nous confirmer le bien-fondé de ce qu’elle nous offre pour faire parti de ce tout : « jusque là, tout va bien, je devrais être bien, je suis bien, ça va aller, j’ai tout ce qu’il faut pour être heureux, je dois obtenir tout ce qu’il faut pour être heureux ». Mais quand le contrôle intérieur ne fonctionne plus, quand le soi se réveille, la crainte de la disqualification nous envahit alors : pourquoi ne suis-je pas satisfait (de ce travail, couple, relations, vie), pourquoi suis-je malade ? Pourquoi suis-je si sensible ? Pourquoi suis-je déprimé(e), anxieux, etc. ? Pourquoi ne puis-je être à l’aise avec les autres ?). Et le sentiment d’inadaptation alors s’installe, avec sa souffrance associée.
L’inconscient collectif, dans notre société, et le mot inconscient est important car cela nous imbibe mais sans être dit clairement, nous invite à contrôler notre intérieur pour être intégré. Pour être « normal ». Pour avoir notre place. Pour être heureux, en fait.
Le difficile dans cette histoire, tout comme dans les relations d’humain à humain, c’est qu’il nous est demandé, et surtout nous nous demandons, de produire un résultat, d’être, de vivre, ce que le contrôle rend impossible. Nous sommes ainsi soumis à des injonctions contradictoires qui nous rendent malheureux et nous donnent un sentiment d’impuissance : sois authentique mais ne montre pas ta vulnérabilité, sois en confiance mais adapte toi à ça et à cela, sens toi vivant mais contrôle tes émotions, ton désir, réalise toi mais éteint ta frustration face à ce qui ne te convient pas, sois brillant mais ne fais pas confiance à tes perceptions non rationnelles, etc.
L’injonction du « sois » est plutôt claire, l’interdiction contrôlante est plus implicite mais elle s’imbibe en nous, d’autant plus fortement qu’elle est signifiée et non dite. Elle s’imbibe dans l’inconscient. Or le 2ème empêche le 1er.
Qui sera responsable de la non réalisation du 1er ?
Ainsi, celui qui reçoit et s’auto-administre l’injonction du « sois » ne voit pas l’interdiction imbibée dans son inconscient. Elle va tellement de soi qu’elle est invisible. Ce sont les « croyances ». N’ayant accès qu’à la première partie, l’injonction, et ne pouvant que constater son incapacité à l’atteindre, il en conclut qu’il n’arrive pas à « produire » ce qu’il devrait produire, être ce qu’il devrait être, ressentir ce qu’il devrait ressentir (joie, confiance, réussite, détermination, zen, abondance, stabilité, etc.). Il en conçoit une sentiment d’insuffisance, ou de culpabilité, ou les deux. Il se sent disqualifié. Il fait donc plus d’effort d’adaptation pour produire ce qu’il doit produire. Être ce qu’il doit être. Mais au bout du bout, cela ne marche pas. Car une part en lui s’interdit d’être.
Ces demandes contradictoires opèrent une pression extraordinaire sur nous quand nous sommes enfants, car nous ne pouvons les satisfaire sans renier une part exacte en nous (l’authenticité, la sensibilité, les émotions, le génie, l’humour, l’originalité, la créativité, la vulnérabilité). Quand nous la renions ainsi, nous nous retrouvons alors dans une sorte de simulation de ce qu’il « faut » ressentir, de ce qu’il faut « être » (joie, paix, puissance, spontanéité, naturel, confiance en soi, zen, etc.), mais sans que l’énergie soit palpable. Observer des gens danser est un bon exemple de ce phénomène : ça danse mais en contrôle, sans s’abandonner pleinement, ou au contraire, ça force la danse et l’alcool y aide parfois. Ou ça ne peut danser car l’énergie ne sera pas exacte. Ca ne sera pas le soi qui danse mais le persona. Une part en nous s’y refuse.
La crise
Les adolescents souffrent plus ouvertement du système, car leur soi est affleurant, puis nous adultes, aux abords de la quarantaine ou cinquantaine, quand le soi n’en peut plus. Cette « crise » est celle dont parle Jung quand il est l’heure d’écarter toutes les injonctions et interdictions auxquelles nous nous sommes soumis inconsciemment depuis l’enfance, et ce pour devenir qui nous sommes vraiment, progressicement. Dabrowski parle de 5 étapes dans cette déconstruction, et elle peut avoir lieu… comme ne pas avoir lieu. L’individuation ou la désintégration positive ne concernent en effet que certaines personnes, en particulier les hypersensibles, les hauts potentiels, quand les autres resteront dans une sorte d’immobilité adaptée et satisfaite, simulée peut être, mais en sécurité.
Il semble cependant que ce « stationnement » dans l’intégration primaire (voir ici une description) soit de plus en plus impossible. Les « autres » se réduisent. De plus en plus. Est–ce les vibrations de la terre, la montée d’une force opposée dans l’inconscient collectif ? La déconstruction est en tout cas une marée montante qui semble emporter avec elle petit à petit tous les humains de cette terre, les uns après les autres.
L’affleurement du soi
L’hypersensibilité est une réaction au contrôle du ressenti (donc de l’énergie du soi) face à l’injonction du persona, du mental, cette émanation de la psyché collective. Pourquoi certains sont-ils plus confrontés à l’énergie du soi que d’autres ?
C’est assez mystérieux. Peut-être parce qu’ils tentent de la contrôler ? Sans doute parce qu’elle est plus forte ? Et peut être est-elle d’autant plus forte qu’elle a été contredite ? Tout ça à la fois ?
Pourquoi ceux qui font le choix de la sécurité ne sont-ils pas dérangés par l’énergie du soi ? Peuvent-ils tenir longtemps ainsi ? Seront-ils malades ensuite ?
Il n’y a pas de réponse globale. Le traitement en chacun est unique.
Les hypersensibles ont en tout cas des ressentis qui affleurent plus que chez les autres. Ils veulent souvent les contrôler mais la force du ressenti est trop forte. On peut appeler cette énergie du ressenti kundalini, Qi, émotions ou énergie vitale, elle est en tout cas là. Et elle affleure.
Cet affleurement de perceptions, de ressentis envoyés par le soi rend sensibles à des choses qui peuvent passer à l’as pour d’autres : on est sensible au manque de sens, à la fausseté d’une personne, au malaise sur un plateau télé, à un abus de pouvoir, à la dépendance, à l’émotion d’une personne, à l’intention d’un autre (surtout non dite ou cachée). Des affleurement qui paraitraient bien naturels et pleins d’enseignements chez d’autres peuples mais qui deviennent un problème de défaillance ici.
Bien sûr, ils obtiennent un avantage en gardant cette faculté du ressenti : capacité d’émerveillement, d’enthousiasme, spontanéité, intelligence, perceptions, créativité artistique, inspiration.
Mais ils obtiennent aussi un inconvénient : ils paraissent inadaptés et leurs ressentis, sauf dans la création artistique, sont dérangeants. On doit effacer ces symptômes.
Un hypersensible ne l’est que parce qu’il tente de contrôler sa sensibilité. A une certaine étape de ce chemin d’affirmation du soi, vient une fluidité dans les ressentis. Ils ne deviennent plus que porteur de messages qui sont entendus instantanément. Ou en tout cas rapidement.
Dans la théorie de la désintégration positive de Dabrowski, c’est les 4ème et 5éme étapes. Ceux qui atteignent cette phase après un long processus de libération intérieure ne se débattent plus avec leurs ressentis car leur persona ne résiste plus, ou de moins en moins. Le soi a pris l’espace. Dabrowski cite ainsi Saint-Exupery, Eleanor Rooselvelt ou Ghandi, mais on peut en identifier beaucoup d’autres dont on observe le processus en cours sur Youtube même ! Keanu Reeves ou Jim Carrey en sont des exemples plus rigolos.
Au quotidien
Si on revient plus prosaïquement sur la vie au quotidien pour un hypersensible, ce travail du soi invisible leur fait une belle jambe. Car tant que le travail de déconstruction ne s’est pas mis en branle de façon consciente et désirée, elle est vécue comme une malédiction. Et elle fait mal.
Peurs, angoisses, émotions débordantes, frustrations, impuissance, échecs, phobies. Addictions pour faire diversion à cette énergie qui tente de passer mais reste bloquée dans le corps. Parfois elle s’associe à une maladie chronique ou des symptômes mentaux (bipolarité, dépression).
Un état qui peut rendre difficile des choses qui semblent a priori faciles pour les autres : l’adaptation, la relation à l’autre, le projet, le travail, l’intégration. Le statut d’artiste est une bonne façon de s’en sortir car c’est à peu près le seul endroit où ces messages du soi seront valorisés et recherchés. Car le persona n’a pas d’inspiration. Ou s’il en a, c’est assez plat et convenu. Dans ce contexte, le persona devient un problème.
Mais ailleurs, le persona, notre part mentale adaptée, est la norme. Et elle nous paraît bien normale. A vraie dire, nous ne la voyons plus (d’autant plus que c’est nous que nous suspectons de déviance). C’est la norme. Mais elle est visible de l’extérieur.
Quand je suis allée en Afrique, pendant deux ans, j’ai vécu dans une maison que je partageais avec des blancs, à Conakry en Guinée. Mon hypersensibilité me complexifiait bien la tâche avec mes colocataires. Je ne me sentais pas bien, je me sentais isolée, j’étais traitée comme si j’étais bizarre et je me sentais à vrai dire totalement bizarre. Je souffrais beaucoup de cette situation. Un jour, un habitant du quartier m’a posé cette question alors que je buvais mon café dans la rue : pourquoi es-tu normale toi et les autres sont-ils bizarres ? Cette question a tinté à mon oreille je vous assure ! Pourquoi les trouves-tu bizarres ? Ils sont rigides, froids. Ils ne sont pas spontanés. lls ne sont pas chaleureux. Ils ne sont pas agréables.
C’était la première fois que j’avais une autre perspective sur mon hypersensibilité ! Mais j’étais dedans, j’ai oublié cette discussion pendant les 15 années qui ont suivi…
Je partage ici quelques extraits du Papalagui qui raconte les impressions d’un chef de tribu Samoen qui découvre l’Europe au début du siècle (mais vous verrez, ça n’a pas beaucoup changé).
Pour le Papalagui [l’homme blanc], l’habitude de penser est souvent sur le chemin comme un gros bloc de lave dont il ne peut se débarrasser. Il pense à des choses gaies, mais n’en rit pas, à des choses tristes, mais n’en pleure pas. C’est un homme dont les sens vivent en conflit avec l’esprit, un homme divisé en deux parties.
Le Papalagui est pauvre parce qu’il est possédé par les objets. Il ne peut pas vivre sans les objets….
…. Vous savez, mes frères, que je ne vous mens pas et que je vous dis tout comme je l’ai vraiment observé, sans en rajouter ni en enlever. Eh bien, croyez-moi, il y a en Europe des hommes qui posent le tube à feu sur leur propre front et se tuent, parce qu’ils préfèrent ne pas vivre plutôt que vivre sans les objets.Aimons nos coutumes qui ne permettent pas qu’un homme ait plus de choses qu’un autre, encore moins que l’un ait vraiment beaucoup et l’autre absolument rien. Grâce à elles, notre coeur ne devient pas comme celui du Papalagui qui peut être heureux et gai même si près de lui son frère est triste et malheureux.
Etc. Edifiant non ?!!
Les hypersensibles sont imbibés par leur société. Ils se sentent mal mais ils ne voient rien de la matrice. Comment légitimer leur ressenti quand les autres semblent tant se satisfaire ? Comment ne pas le contrôler sans ce recul salvateur de celui qui n’est pas né dedans ?
Le contrôle du ressenti est délétère. Il pose un problème physique en empêchant l’énergie de circuler. L’énergie de nos blessures reste coincée dans notre diaphragme, la gorge, le cœur, le ventre, le corps et n’arrive pas à se libérer. Cela donne la sensation d’angoisse, d’anxiété. Puis la maladie. Le contrôle empêche aussi l’énergie des perceptions, des intuitions de circuler. Et là c’est notre boussole intérieure intuitive qui est cassée. Nous n’arrivons plus à savoir ce qui est bon pour nous, ce qui nous maltraite, ce qui fait sens, ce qui nous anime, ce qu’il se passe vraiment à l’extérieur, ce qui se joue avec les autres. Bref, nous devenons zombifié.
Casser le thermomètre marche sur le coup, mais ça ne résout pas le problème de fond.
L’énergie doit circuler
De manière générale, il y a une loi importante que la médecine chinoise a compris depuis longtemps et que nous commençons à comprendre avec le développement des thérapies énergétiques et la physique quantique : l’énergie doit circuler. Quand elle circule (émotions, flux vitale, conscience), nous nous sentons mieux et vivants. Quand elle ne circule pas, nous nous sentons éteints, ou mal, ou les deux à la fois.
Pour autoriser l’énergie à circuler, nous devons nous libérer du contrôle qui s’exerce malgré nous sur notre énergie vitale, nos ressentis et nos envies. Le persona, le mental fait comme il peut pour nous protéger depuis l’enfance, pour nous éviter de souffrir ou pour donner sens à ce que nous avons vécu, mais il porte les injonctions et croyances sociétales qui nous oppressent, et les croyances personnelles qui nous désignent comme insuffisant ou maudit.
Pour que l’énergie circule, nous avons donc une double démarche à entamer :
- favoriser la circulation d’énergie (c’est ce que permet la libération émotionnelle, le yoga, le QI Qong et toutes les thérapies énergétiques et émotionnelles),
- observer notre voix mentale (ou la matrice sociétale, c’est la même chose) pour commencer à s’en dissocier : découvrir nos injonctions inconscientes, nos croyances, nos équations erronées, nos « oui, cela est probablement normal », tout ce que notre intérieur a enregistré progressivement et inconsciemment comme normal et qui ne nourrit pas ses besoins humains.
La crise, nécessité pour sortir de l’imbibation
Peut être avez-vous déjà vécu cette expérience ? Avez-vous déjà soudain trouvé incohérent, en quelques jours, voir parfois en quelques secondes, ce qui vous paraissait pourtant ok depuis des années ? A ce moment précis, votre conscient a pris le pouvoir sur l’imbibation matricielle. Ce qui passait jusque là pour ok, « c’est comme ça », vous paraît soudain comme non adapté, sans sens, décalé, absurde.
Ca peut arriver sur la maltraitance animale, les arbres coupés, l’école, la santé, bref, sur tous les sujets. Cette montée de conscience, elle se fait par la crise.
La crise, c’est le frottement entre le soi et le persona. En arrière plan, on retrouve alors toujours une « oppression » (une croyance : une injonction, une interdiction) sociétale, relayée par notre persona mental, qui s’exerce sur nous et provoque la crise.
La crise est donc l’occasion alors d’une déconstruction de quelque chose qui nous oppresse. A chaque fois que nous conscientisons ce qui nous oppresse, et que l’émotion en même temps lâche, un soulagement et une libération indescriptibles nous saisit. Ils durent plusieurs jours, plusieurs semaines… jusque à la prochaine (et bienfaisante) crise.
Il y a toujours un avant et un après crise. Si petit soit-il. Nous ne serons plus jamais exactement la même personne.
Le risque est de ne pas prendre la crise pour ce qu’elle est, une occasion de déconstruction, une nécessité intérieure portée par notre âme qui se veut libre, mais d’y appliquer un regard matricé par nos conditionnement et vouloir en sortir à tout prix, avant même d’en avoir compris le sens profond.
Nous poursuivons alors les thérapies non pour être plus en conscience avec cette libération, mais pour nous sentir juste mieux dans l’instant. Nous le vivons également dans cette course à la spiritualité. L’inscrivons-nous dans notre quête d’individuation (Jung), ou de déconstruction (Dabrowski), dans une forme d’allégeance à notre âme (ce qui demande beaucoup d’humilité) ? Ou cherchons-nous simplement à ne plus souffrir coute que coute et le plus rapidement possible ?
Cette dernière quête nous fait prendre des postures, des décisions inadaptées. Car en faisant le choix d’éviter la souffrance en priorité, nous ne l’éviterons pas, quoique l’on fasse, et dans la durée, elle ne produira pas de conscience.
Chogyam Trungpa appelle cette démarche le matérialisme spirituel, cette tendance à non pas quérir dans l’humilité pour découvrir qui on est en acceptant les « crises », mais au contraire la tendance à vouloir en priorité éradiquer les symptômes de mal-être et renforcer la confiance en soi, et parfois, l’égo (avec cette satisfaction de se sentir « illuminé », plus « éveillé » que les autres). Bref, le fait de ne pas accepter la crise et de se battre contre elle, nous apporte un soulagement temporaire mais ne règle pas le problème.