C’est la première fois que j’écris un article non pas parce qu’il me tombe dessus, mais parce qu’on me le demande. Ou parce que le sujet m’est proposé. Bizarrement, la demande précède l’évidence, car c’est un vrai sujet pour moi actuellement.
Je pensais ne pas avoir peur d’oser être moi. J’avais toujours été cataloguée anti-conformiste, il me semblait être assez radicale (comme un ami me l’a signalé dernièrement) pour ne pas me compromettre dans toute chose galvaudée de moi-même (mais d’où vient cette phrase ?!).
Je me trompais. Si j’étais déjà pleinement moi et entière, je n’aurais plus besoin de faire l’expérience de moi, et ce serait la fin. Or je suis vivante. C’est donc bien que j’ai encore des choses à découvrir sur moi.
Je ne sais comment commencer cet article mais je me sens toute énergétique, ça commence bien.
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Frustration, déception, exigence
Pour parler de ma simple expérience, j’ai découvert qu’il y avait une conne en moi. Elle a toujours été là. Mais je la niais. Je m’explique.
Jusqu’à récemment, je souffrais avec la plupart des gens : les amis, les connaissances, les clients, moins la famille. Pourquoi ? Parce que je n’obtenais pas ce dont j’avais besoin : l’écoute, la présence, les discussions existentielles, l’engagement de mes clients, les clients qui se dédient entièrement à leur moi, oui je sais, mdr.
Je souffrais de tout ça.
Adaptation, contrôle et angoisses
Il fut une époque où je m’adaptais et où je contrôlais. Ca paraissait ok, plus ou moins. Mentalement c’était ok. Intérieurement non, mais je ne le voyais pas. Pourtant j’avais des sensations physiques qui me disaient clairement que non, ça n’allait pas. Avec telle personne, dans telle situation, telle action, mon corps m’envoyait des alertes que je redoutais et refoulais. Je me sentais soudainement angoissée, sans savoir pourquoi et plus je contrôlais évidemment, plus j’étais en panique (quand on a décidé de fermer la porte, l’énergie trouve d’autres voies …). Il fut une époque où j’étais donc obligée de prendre des antidépresseurs pour pouvoir sortir dans la rue…
Le stand by
Puis, avec mon « enclenchement » il y a trois ans (j’en ai déjà parlé, j’y reviens pas), je suis devenue plus consciente de mes besoins. Ou disons que j’ai commencé à reconnaître que certains groupes, personnes, amis n’étaient pas en fait ok pour moi. J’ai arrêté de voir pleins de gens, j’ai arrêté de me fatiguer sur mon activité, d’attendre des gens, j’ai laissé faire. Je me suis retrouvée seule avec moi-même et, j’avoue, c’était plutôt pas mal. C’était choisie. J’avais une forte pratique méditative pour soutenir le tout. C’était plutôt cool. Je garde un bon souvenir de cette période pleine de découverte intérieure et très indépendante par rapport au monde extérieur…
La réactivation, re-frustration, colère
Hélas, revient le temps du besoin et de l’énergie (comme dirait Harmonie du compagnonnage : « Put*** d’instinct grégaire ») : besoin de rencontrer les autres, besoin de ressentir, de partager, besoin de bouger, d’impacter, de discuter, de faire à plusieurs. Bref, put*** d’instinct grégaire. Telle l’adolescence où l’intensité a besoin de se confronter, me voilà repartie à l’assaut de la vie. C’est là où ça redevient délicat.
Dans cette envie de repartager avec le monde, je me reconfronte d’abord avec ma propre insatisfaction chronique. En revanche, une chose bouge. Rapidement, au lieu de poursuivre la boucle mentale (d’avant) de mon incapacité structurelle (à vivre telle situation, vivre telle relation), je me surprend à être en colère et à grogner contre l’insuffisance des autres (le manque de présence, le manque d’intensité, le manque d’engagement…). Je m’en lamentais avant d’un point de vue « c’est moi… », là, je ne suis plus victime, les autres sont juste cons. Ils sont pas assez ci, pas assez ça.
Je ne suis pas dupe de ce flux. Je vois bien l’in-justesse des pensées, la mauvaise foi intérieure. Je ne vois pas encore la conne en moi, je suis juste surprise de ces pensées et je sens confusément que cette énergie doit circuler. Qu’elle n’est que transitoire. Contrairement à avant, je ne refoule pas, je ne nie pas, je laisse. Et comme dirait Osho, quand la colère succède à la tristesse, on est pas loin du but…
Il y a une conne en fait
Puis, je découvre, officiellement pourrais-je dire, qu’il y a en moi une conne, en fait. Bien au delà de la simple émotion de colère. Une conne qui juge, qui s’indigne, qui est pas contente, qui dit merde, qui se plaint, qui a envie d’envoyer chier, qui peut refuser, dire non, bref, je découvre que l’image d’épinal que je me suis racontée sur moi n’est pas vraie. C’est juste une part de moi, un peu forcée, de la fille qui serait toujours sympa et bienveillante. Cette image là, pas pratique car elle fout le bazar dans ma vie (je vous explique après pourquoi), est exactement à la mesure de la part inverse refoulée en moi, la part sombre : la Gwenn radicale, en colère, exigeante et parfois, quelle horreur ! jugeante.
Je découvre que j’ai les deux parts en moi. Et clairement, la part refoulée, niée, est en train de m’apparaître au grand jour. Je la sais transitoire, et compensatoire de la part forcée, idéale, parfaite, digne d’être aimée, généreuse. Du coup, c’est incroyable, mais passé le moment d’horreur, je commence à accepter cette part conne en moi. C’est sans doute d’ailleurs parce que je sais qu’elle n’est pas moi. Je commence à comprendre qu’elle n’est que la compensation énergétique de la perfection forcée à laquelle je me suis obligée (sans le savoir) toute ma vie (à ma sauce : non jugement, pas de colère, bienveillance permanente, écoute, remise en cause, sagesse, bref le piège féminin).
L’équilibre énergétique, ou le transurfing de la conne
Car oui, les deux s’équilibrent énergétiquement, telles le yin et le yang. Un se renforce, l’autre aussi. Tu refoules la part sombre, elle se renforce. La part parfaite forcée se renforce aussi alors. Tu en diminues une, l’autre diminue aussi.
Si les 2 diminuent, il reste quoi ? Moi. Dans ma perfection originelle.
Passer une bonne soirée malgré soi…
Ce que j’ai expérimenté, c’est qu’en acceptant cette part sombre en moi, j’ai commencé à me sentir plus à l’aise avec les autres. Plus tolérante, mais aussi plus expéditive. Là je le livre déjà conclu, mais ça ne s’est pas passé exactement comme ça. J’ai d’abord vécu plusieurs moments de détente relationnelle répétés avant de faire un lien.
La première fois, c’était une soirée. Le lendemain, je pense : elle était sympa cette soirée. Pas seulement ok. J’étais vraiment détendue. J’ai profité. J’étais dans le flux. Autant vous dire que ça ne m’arrivait plus souvent depuis un moment ! Sur le coup, j’hallucine. Puis je me retrouve plusieurs fois de suite à partager d’autres moments où je suis détendue. Sans questionnement, sans frustration, sans l’impression d’absorber l’énergie de l’autre, son contrôle, ses non-dits. Et avec des personnes qui ne m’apportent pas la présence ‘(absolue) dont j’ai habituellement besoin. Bref, je me surprend à être détendue en toutes circonstances avec un petit côté « je m’en foutiste » assez curieux. Comme si je ne m’attendais pas à ce que en face, ça réponde à mes besoins, et que je m’en foutais. Ciel.
Etre soi, ça détend
Ce que j’en ai compris, c’est que en autorisant la part sombre en moi, en laissant cette énergie circuler sans la juger, j’ai commencé à mettre moins de pression sur l’extérieur.
En acceptant la conne en moi, j’accepte aussi ses besoins, ses exigences, sa radicalité. Elle se porte garante du respect de mes besoins. Puisqu’elle n’a pas peur d’être conne. Ces besoins, en sachant qu’ils sont protégés, à chaque rencontre, à chaque minute, relâchent la pression sur l’extérieur. La conne en moi veille. Et elle ne cherche pas l’assentiment des autres. Elle est prête à ne pas être toujours « parfaite » pour que mes besoins soient satisfaits. En vrai. Sa priorité, c’est moi. Uniquement moi.
La conne en moi n’est pas là pour être au service des autres. Elle est là pour me permettre d’être dans mon flux à moi. Et c’est un travail à plein-temps. On n’a pas le temps de faire attention aux autres pour cette grand œuvre. On ne s’en occupe que parce qu’ils aident à l’œuvre (et probablement réciproquement). Il y a échange d’énergie, de désir, de conscience. Mais l’œuvre, mon œuvre, c’est moi. C’est pas mes enfants, c’est pas mon activité, c’est pas les autres et comment je leur suis utile, c’est moi. Ensuite, peut-être, et probablement, je serai pleinement disponible vers l’extérieur. Pourtant je l’étais. Mais avec cette part encore qui cherchait la perfection. Le dévouement. Le résultat. C’est un mirage…
Bref. La conne en moi est mon ange gardien.
L’énergie doit circuler, c’est le cinéma qui le dit !
J’accumule les preuves de cette grande règle quand je regarde des films. Chaque film que je vois, je constate que rien n’est plus photogénique que des gens qui laissent l’énergie circuler : colère, haine, tristesse, agacement, joie, amour, désir, vengeance. On ne filme pas des gens qui retiennent l’énergie. On filme des coups de gueule, des crises, des réactions, des déclarations, des élans, des envies, de l’action, des gens qui s’énervent, qui ont honte, qui aiment, qui sont troublés… même s’ils pètent un câble devant les autres.
Et c’est alors une vraie question : jusqu’où s’autorise t-on à péter un câble quand ce n’est pas ok pour nous ?
Origine de l’interdiction du flux de la conne
Jusqu’où sommes-nous en contrôle de notre flux de colère intérieure ? Je ne parle pas de lâcher la colère forcément, je parle de la ressentir et de l’accueillir, comme témoin de nos limites dépassées. Et ce contrôle me renvoie à l’hypersensibilité.
C’est une vraie question de savoir pourquoi on veut tant être parfait quand on est hypersensible. Pourquoi est-il si nécessaire d’être parfait, irréprochable, non critiquable ? Pourquoi certaines personnes s’en foutent et assument leurs flux d’énergie, même les plus négatifs, quand d’autres les soupèsent en permanence pour savoir si c’est ok
Quand est-ce que ça commence ?
Me concernant, j’ai le souvenir d’une enfance où beaucoup de colère s’exprimait en permanence, toujours du même côté, celui des hommes. L’ambiance était tendue, l’harmonie collective en berne, nous étions en permanence sous le joug d’un coup de gueule ou de violence de mon père ou d’un pétage de plombs (souvent haineux) de mon frère. Ma mère était en effort permanent pour contrôler et absorber sans réagir. J’ai pour ma part adopter le point de vue que si je me laissais moi aussi aller à péter des câbles, on ne s’en sortirait jamais. Tout serait foutu. Peut-être ai-je voulu ne pas en rajouter une couche pour ma mère ? Dieu seul sait. Donc j’ai pris le parti d’essayer d’apporter un minimum de calme et d’harmonie en empêchant tout flux négatif injustifié, « non-sage » de sortir de moi. Je ne me l’autorisais pas. Il y avait aussi peut être ce côté que, en tant que fille, ma colère, ma mauvaise foi instantanée (car nous le sommes toujours un peu quand ça sort à l’instant) ne seraient pas aussi bien acceptées que celles de mon frère. Possible. Mais peu importe. Je me suis interdite le flux « négatif ». Je ne suis pas sûr qu’il aurait été accepté aussi bien qu’avec mon frère.
Il me revient deux moments où j’ai laissé ce flux passer. Deux fois avant 18 ans. Une fois avec mon père. J’étais en colère. J’ai fugué 2 heures dans la foulée. Puis une fois dans un magasin grecque en camp de vacances. Mon short s’est accroché à un bac, deux garçons ont rigolé de moi, et je les ai mouchés. Le truc qui ne sortait jamais de moi, est sorti. Pourquoi ? Peut-être parce que j’avais marché pendant 2 semaines dans la nature. Je n’ai pas compris. J’ai cru qu’une apocalypse allait me tomber dessus dans la seconde où c’est sorti. Mais rien ne s’est passé. Ils ont été mouchés, ils sont partis. C’est tout. C’était malgré tout la dernière fois que je laissais ce flux sortir. Le contrôle a repris sa place ensuite, toujours avec cette sensation que si on lâche… quelque chose de très grave va se passer.
L’univers s’en fout du bien et du mal
L’univers s’en fout de savoir si c’est bien ou mal. Ce n’est et ça n’a jamais été le sujet. Tout est expérience. Une seule règle prévaut : l’énergie doit circuler. Quand l’énergie ne circule pas, elle explosera. Donc elle circulera, de toute façon. Mais la cible sera peut être, probablement, nous-même.
Je dois, je peux laisser l’énergie circuler en moi : mes émotions, mes désirs, mes limites, mes besoins, mon flow intérieur, mon inspiration, ma colère, mes nons, mes jugements, etc. Ca doit circuler. Ca ne veut pas dire qu’ils se matérialiseront à l’extérieur « contre les autres ». Ca veut dire que je peux choisir de les autoriser en moi. Je renonce à cette image de perfection cultivée toute ma vie, qui n’a fait que générer cette résistance intérieure du sombre qui, de toute façon, sabote énergétiquement le oui officiel. Alors, quitte à être sabotée, autant assumer l’énergie intérieure. Puisqu’elle n’est que transitoire…
Je n’ai rien à prouver. Je suis déjà parfaite. Avec mes imperfections. Ma fille est parfaite telle qu’elle est. Et Dieu sait qu’elle a des imperfections. Mais je l’aime. L’énergie circule en elle. Et c’est beau. Malgré tous ses défauts.
Et finalement, je ne suis pas conne avec l’extérieur. En acceptant la conne en moi, l’exigeante, la radicale, en autorisant ce flux énergétique, je le libère. Je suis moins crispée avec les autres, moins en attente, moins frustrée. Je n’attends rien. Je sais qui si ça ne va pas, je m’en rendrais compte et j’autoriserai le flux. Je sais que je suis ma priorité.
Car je suis libre. D’aller où je veux. De refuser ce qui ne me va pas. D’envoyer bouler. De poser mes limites.
Finalement, ça se fait à travers moi. Il n’y a pas d’efforts. Oh miracle de l’énergétique, en autorisant la conne en moi, je deviens finalement… moins conne.
Alors si on devait imaginer un petit exercice d’observation de soi…
- Quelle image de toi tiens-tu à préserver ? Quelle personne ne voudrais-tu pas être ?
- Peux-tu voir ce que ce que tu t’efforces d’être et qui empêche l’énergie de protection de tes besoins de circuler ?
- Sens-tu comme la part idéale de toi te permet au service de l’énergie des autres, mais pas de la tienne ?
- Acceptes-tu le con en toi parce qu’il est transitoire et légitimement en réaction à ta part idéale et forcée ?
- Renonces-tu à faire des efforts pour être aimé parce que ça ne marche pas comme tu crois ?
(on aime quand l’énergie circule, pas quand elle est retenue, c’est pour ça qu’on aime les enfants, même chiants) - Renonces-tu à l’idée que tu aies une quelconque obligation ou devoir dans ce qui se passe pour l’autre ?
- Acceptes-tu le jugement, la colère qui te disent que tes besoins ne sont pas respectés, même s’ils sont cons sur le coup ?
Et voilà.