Cet article est une deuxième version de l’article Nourrir nos besoins essentiels | La résistance empêche la jouissance, écrit en essayant de corriger quelques fautes sur le premier, et bang, le flux est sorti. Extraction…
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Nous avons des besoins. Il y a ceux que l’on croit devoir remplir pour être heureux. Et ceux qui nous nourrissent vraiment et durablement. Les premiers sont matriciels. On s’en détache progressivement quand nous touchons notre « crise ». Les autres sont essentiels à l’humain… Mais pourtant peu conscientisés, et surtout peu soutenus par notre société : le besoin de sens, le besoin d’écoute, d’accueil, de présence, de vibration, de passion, d’énergie circulante.
Quand on lâche les premiers, on croit pouvoir bénéficier (enfin !) des seconds. C’est hélas plus tricky.
Les besoins matriciels et les besoins humains
Posons le cadre.
A cela, soit nous réussissons, sur le papier, mais il est possible qu’une anxiété de fond nous habite, malgré nous, sans que nous puissions en identifier la source. Nous ne pouvons alors que maintenir le statut quo, tout est super et nous publions sur les réseaux sociaux pour montrer que tout est super.
Soit nous ne sommes pas doués, et nous courrons après sans succès (sans savoir que si on l’avait…). Souvent alors, on se morfond de soi et de la vie. Et celle-ci prend une teinte grisée…
Nous avons aussi des besoins essentiels d’humains, qui eux pour le coup sont vrais : se sentir intégré, être en relation, se sentir respecté, utile, se sentir relié aux autres et à soi-même, se sentir vivant (énergie, joie), se sentir en sécurité, se sentir sensible, ouvert. Et probablement s’abandonner à plus grand, mais tout le monde ne me croira pas.
Notre société n’est pas à proprement parler organisée autour de ces besoins. C’est comme s’ils étaient acquis, ou pas suffisamment importants pour que l’on s’organise autour, c’est donc à chacun de se débrouiller pour les nourrir (ça devient souvent alors une histoire familiale).
Nous les connaissons plus ou moins, ces besoins. Certains sont mieux conscientisés que d’autres (être en relation est plus conscientisé que se sentir vivant). Nous les touchons plus par le plaisir tiré d’une situation ou par la souffrance du manque, que par leur inscription sur une liste officielle, c’est clair. Et pourtant, nous pouvons organiser notre vie autour de l’un d’eux. Parfois sans le savoir.
Parfois, souvent, nous en ignorons certains. Pourtant la liste n’est pas grande. Alors qu’ils sont bien là, tapis au fond de nous.
En tout état de cause, comme notre société ne s’axe pas sur le fait de les nourrir (comme ça peut être le cas chez d’autres peuples), c’est donc à nous d’en organiser le nourrissement. Nous avons alors un problème, nous sommes obligé de prioriser, car notre société ne permet pas le nourrissement de tous. Damn.
Prioriser ses besoins pour survivre
Ce qui est intéressant ici, c’est que nous sommes amenés à faire des choix. A poser des priorités. Notre société étant peu adaptée à ce qu’est un humain, nourrir l’un nous oblige généralement à renoncer à un autre. Ou à renoncer à une part de soi.
Par exemple, pour certains, se sentir en sécurité nécessitera de se fermer à sa part sensible et donc de se sentir moins vivant. Ou bien être en lien avec les autres peut nous obliger à renoncer à qui on est vraiment ou à notre besoin de sens. Ou bien être soi nous obligera à renoncer au sentiment d’appartenir au groupe. Tout cela varie selon la personne et son environnement.
Ces priorités ne sont pas l’œuvre de notre conscient. Rarement. Mais parfois si. Comme je l’ai déjà raconté, ma nièce qui a bientôt 30 ans m’a dit avoir un jour consciemment décidé à 11 ans qu’elle ferait tout pour ne pas finir comme d’autres enfants, seuls dans la cour et errant dans l’angoisse, y compris renoncer à qui elle était vraiment. Sa soeur a fait l’inverse : elle a voulu rester qui elle était, avec sa part sensible, mais elle a du coup renoncé à l’intégration. Elle a été lourdement, très lourdement disqualifiée (une douleur sans nom qu’elle appelle son Tchernobyl intérieur !). La cadette a priorisé de la même façon que la grande mais pas sur la même chose (elle m’a aidée à comprendre l’adaptation de ma fille dont j’étais fortement marrie).
Selon les profils, on a des standards de priorisation et de renoncement différents.
Si on revient sur les profils d’hypersensibilité, les hypersensibles durs, et les hypersensibles doux aussi, ont tendance à chercher du sens sur ce qu’ils vivent. Cela les amène rapidement à créer des équations erronées et dévalorisantes sur eux pour pouvoir expliquer les expériences vécues.
Pour d’autres profils, la recherche de sens sera moins prioritaire que le besoin de sécurité. Ils auront donc des conclusions moins dévalorisantes sur eux, mais ils ne sentiront pas quand leur vie ou leurs actions ne font pas sens. Ils s’adapteront beaucoup plus sans moufter.
La priorité choisie fragilise de facto d’autres besoins, en tout cas chez nous, occidentaux. Pour les hypersensibles durs par exemple, la recherche de sens et le fait d’être soi menace fortement la sécurité et le fait d’être en relation classique, normée.
S’ils conscientisaient tout cela, peut être voudraient-ils revenir sur leur choix. Mais les choix sont inconscients et on ne peut les défaire par le simple fruit de la volonté. Ils sont liés à nos plus grandes peurs et à nos priorités d’âmes. Ce sont comme des contrats avec nous-même. Pour survivre. On ne peut y travailler qu’en approchant ces équations, et la grande peur ou la grande blessure derrière.
Pour les hypersensibles doux, il y a aussi un besoin de mettre du sens, d’où les équations erronées sur soi. En revanche, la sécurité est extrêmement priorisée. Le besoin d’être soi et se sentir vivant sera donc moins préservé. Mais ils seront mieux intégrés au groupe. Ils auront des relations interpersonnelles plus apaisées.
Être soi est ce que j’appellerai la part exacte en soi, et c’est la plus grande sacrifiée, dans notre civilisation. C’est d’elle dont nous allons parler.
La part exacte, source de notre souffrance
Pour nourrir nos besoins essentiels, en tout cas ceux priorisés, nous renonçons :
- soit à une part de qui on est vraiment, la part exacte en nous, et c’est la voie la plus connue dans notre société
- soit nous essayons d’y rester fidèle, mais de facto, des besoins essentiels (intégration, utilité, relation à l’autre) seront sacrifiés et nous nous retrouverons en souffrance et en manque.
A l’endroit et à l’époque où nous sommes nés, il est de toute façon difficile de ne pas renoncer à une part de soi, ou en tout cas de ne pas souffrir de ce tiraillement entre être soi et nourrir ses besoins (matriciels ou essentiels). Que l’on veuille préserver cette part ou qu’on l’oublie, de toute façon, on souffrira. De façon plus ou moins ouverte.
Ouverte pour ceux qui tentent de la préserver mais se retrouvent en déconnexion avec le reste de la société, les besoins mal nourris.
En profondeur mais plus discrètement pour ceux qui s’adaptent aux besoins matriciels car sur le papier, tout va bien.
Et entre les deux, une gamme infinie de déclinaison et de souffrantes plus ou moins évidentes.
Cette part exacte est donc la source de notre souffrance.
Les besoins qui malmènent la part exacte
La part exacte ignorée nous tiraille, entre nos choix, nos « sauvegardes », et ce qu’elle veut. Pour certains, elle sera prégnante et le tiraillement insatiable. Pour d’autre, elle sera discrète et elle attendra son heure, laissant à la vie un goût de rien. Parfois, son heure est sur notre lit de mort. Et nous pourrons rejouer encore une fois (plusieurs mêmes !).
Cette part exacte en nous est exigeante, vulnérable, sensible, consciente, et souvent déviante du modèle d’humain que nous nous sommes invités à suivre (chacun a un modèle unique qu’il poursuit, agglomérat d’inconscient collectif actuel, civilisationnel, familial, personnel, karmique).
Nous la gardons donc bien au chaud, et en attendant, nous réussissons à préserver certains de nos besoins.
Dans notre société, ce sont la sécurité et l’intégration que nous essayons de préserver le plus. C’est une gageure, car notre monde est défiant, le jugement et la peur sont partout, se sentir sécurisé et intégré à un groupe est donc une sacrée mission, surtout en France. Tout le monde la poursuit avec plus ou moins de succès, surtout quand elle n’est pas la mission prioritaire (sans qu’on le sache). Mais bref; pour nourrir ces deux besoins, il est difficile de préserver la part exacte en soi. Chez nous.
Pour ceux d’entre nous qui tente de la préserver, c’est alors notre rapport aux autres qui devient problématique, notre intégration devient difficile. Et nous devenons des petites boules de souffrance dans le rapport aux autres.
On pourrait ainsi séparer le monde en deux, ceux qui ont préserver une part exacte en eux, et dont les principales blessures viennent du rapport aux autres et à la société (= les hypersensibles) et ceux qui sont mieux adaptés aux autres et à la société, mais qui ont perdu le lien avec leur part exacte. Les blessures des premiers sont plus apparentes. La blessure des deuxièmes est plus discrète mais plus affectante sur le plan de l’âme, forcément.
La vibration sans la part exacte
Je ne suis pas sûre qu’on puisse pleinement être nourri dans nos besoins quand on a abandonné une part exacte de soi. C’est comme si cette part laissée derrière nous générait une tension intérieure, une sorte de résistance qui empêche la pleine disponibilité, la pleine jouissance.
Pourtant, sur le papier, les choses peuvent être nickel. Mais, jouit-on pleinement et durablement ?
Oui le lien à l’autre est là, mais est-il connecté ? Oui, l’intégration est là, mais est-elle heureuse et généreuse ? Oui, on se sent vivant quand on fait la fête ou qu’on part en raid, mais le reste du temps, c’est comment ? Tout est un peu comme du Canada Dry, ça a le goût et l »aspect de la jouissance, mais est-ce vibratoire ? Parfois oui. Parfois, non.
Ma fille a des amies, mais malgré tous les supers moments qu’elle passe en soirée et autres, elle finit souvent épuisée et frustrée, sans même savoir de quoi..
Ma nièce a un super travail et plein d’amies, mais quelque chose lui manque au fond et la rend insatisfaite.
Les rituels druidiques, les festivals chamaniques sont chouettes, mais les gens semblent comme affaiblis, apeurés à l’intérieur.
E. est un mec super zen, mais il y a une sorte de tension permanente en lui.
B. est satisfait de sa vie, mais il semble en même temps éteint.
M. a un chouette travail, mari, enfants, et amoureux annexes, mais une sorte de mélancolie de fond vient la sabrer régulièrement pour l’envoyer à l’HP.
Etc etc etc. (et moi aussi, probablement).
Quand nous comprenons petit à petit nos vrais besoins essentiels d’humains, quand nous commençons à laisser tomber les besoins matriciels, nous nous attendons à jouir pleinement de ce que nous créons dans notre vie : projets, lien aux autres, sens, nature, sens, connexion… Il est surprenant de voir combien parfois, ça ne fait pas le taf. Pas encore.
Pourtant nous tentons activement de les nourrir, ces besoins. Mais c’est comme si seule la part exacte pouvait être au commande pour que nous jouissions pleinement. Parfois elle l’est, car rien ne l’empêche. Mais souvent elle ne l’est pas. Notre mental est encore au commande. La vibration, la disponibilité, l’énergie n’est pas encore pleine.
C’est comme si tant qu’elle n’a pas été révélée, reconnue, acceptée dans sa singularité et son exigence, si rien ne servait à rien. Ou plutôt si. Tout sert à nous en rapprocher, c’est tout.
Bonjour Gwenn, merci pour votre travail.
Je suis arrivé sur la Piste au fil de quelques recherches sur l’empreinte matricielle et je me suis baladé sur le blog.
J’ai apprécié votre approche sur l’hypersensibilité, comprendre pour vivre mieux un retour à sa sensibilité.
Les expériences que vous partagez ici me parlent, résonnent, infusent…
Je reviendrai vous lire avec plaisir car je trouve dans votre blog un éclairage nouveau aux innombrables questions que je me pose. Merci pour ces belles pistes qui vont m’aider (oserai-je en douter ?) à créer de l’espace, à me détacher de cette matrice originelle et me permettre d’explorer toujours plus loin.
Belle continuation à vous
Cyril
Bonjour Cédric, avec plaisir et contente que ça vous aide !