J’ai repéré deux grands types d’hypersensibles. Il y a l’hypersensible dur, avec ces tensions intérieures extrêmes, son besoin de reconnaissance et son violent frottement avec l’extérieur. Il y a aussi l’hypersensible doux avec un profil plus effacé (au début), moins en puissance, plus en douceur, soyons honnête, plus carapacé aussi, avec une souffrance moins explosive.
Le HS doux a une forte connexion avec son cœur. Il voudrait que le monde fonctionne avec douceur et bienveillance. Il se sent plein d’amour à donner. Mais évidemment, il ne peut pas (encore) le déployer.
Petit, ce qu’il a compris du monde et de sa menace a été : “Ce monde est menaçant et ce que je suis ne semble clairement pas suffire. Si je veux être intégré, si je ne veux pas être une cible, il va falloir que je m’adapte. Donc je m’efface.” A titre de comparaison, l’hypersensible dur n’arrive à décider l’effacement et n’arrive pas à s’adapter. Il reste lui-même malgré lui, et se fait remarquer.
Effacement, intégration et besoin de s’affirmer
La blessure première de l’hypersensible doux, c’est son effacement. Pratique au début, pendant l’enfance, elle lui pèse à mesure qu’il grandit. Son identité ne s’exprime que très peu, et il a l’impression, à raison, qu’il n’arrivera jamais à exprimer son être (le HS dur exprime au contraire son être en réaction, quitte à souffrir). Sa souffrance générale vient de cette non expression de son être. L’expression “Affirmation de soi” revient souvent chez lui après sa crise.
En revanche l’effacement donne au HS doux un avantage : il est intégré. Il a peu de place, mais il est avec les autres. On l’entend peu. Mais il est là. Il est bien aimé d’ailleurs. Peu accueilli sur le fond, c’est ce qu’il sent, mais apprécié pour sa douceur, sa discrétion, sa bienveillance, son naturel. Car oui, s’il est effacé, il a un avantage par rapport aux carapacés de tout poil, il ne fait pas (trop) semblant. Il ne se donne pas un genre. Il est juste lui, mais effacé. Pour comparer, le HS dur en voulant à tout prix exister peut se construire une fausse identité (un “faux self”), toute en tension et qui sonne faux, pendant une bonne partie de sa vie. Le HS doux reste toujours dans sa nature, même si elle est discrète.
Connecté aux émotions mais ne remet pas le système en cause
Comme le HS dur, le HS doux ressent ses émotions pleinement mais ça reste intérieur. Ca ne se voit pas car l’énergie reste contrôlée. Comme le HS dur, il peut rentrer en sur-adaptation, mais plus sur le « faire » (courir après l’argent, le travail, faire ce qui doit être fait, tondre sa pelouse, payer ses factures, avoir des revenus stables, ne surtout pas se distinguer) que sur « l’être » (paraître fort, avoir l’air d’avoir confiance en soi, s’affirmer). Il ne sonne pas faux comme le HS dur parfois, il sonne triste. Il est en pleine conscience de sa souffrance. Et cependant, il ne remet pas le système en cause. Il pense juste être insuffisant.
Caractéristiques
Enfants
- Sensation d’être perdu dans la masse, en primaire et encore plus au collège
- Trouve les autres enfants pas gentils entre eux, parfois pas gentils avec les professeurs.
- N’arrive pas à jouer un rôle, ne peut s’empêcher de rester lui-même, ce qui l’oblige à s’effacer pour ne pas être une cible
- S’adapte à l’identité d’un clan en abandonnant la sienne pour s’intégrer mais en conscience, avec regret.
- Ne profite pas de son intégration pour taper sur les autres. Ne joue pas ou peu des rapports de force. Veut de la gentillesse et du respect.
- A peu d’amis proches. Cherche la connexion avant tout. Aime partager de l’authenticité et de la vulnérabilité. Ne le vit pas beaucoup car choisit peu ses amis. Il est choisi.
- Pour coller à ce qu’on lui demande, essaye de mettre en sourdine son instinct et d’appliquer les processus prescrits. Essaye de respecter les règles.
- N’a pas de problème avec les consignes. Mais s’applique à travailler beaucoup par souci de bien faire. Donc s’applique à respecter les consignes.
- Dors plutôt bien…
- Aime le mode projet si on lui demande pas de se mettre sur le devant de la scène.
Adulte
- Se laisse facilement impressionné par les autres, ne voit que peu de valeur en lui
- Ne se fait pas confiance, donc suit facilement les processus, les règles. A besoin d’exhaustivité pour prendre une décision.
- A du mal à suivre ses intuitions, auxquelles il ne donne pas de valeur, dont il doute.
- A du mal à prendre des décisions, avec le sentiment de ne pas maîtriser suffisamment les données pour se décider, a l’impression qu’une mauvaise décision a des conséquences graves.
- A peur de prendre des risques. Se sent insécurisé facilement. N’aime pas ce qui n’est pas maîtrisé.
- Peut être assez conventionnel, dépendant de son image vis à vis des autres, sans pour autant (trop) emmerder ceux qui ne sont pas conventionnels (sauf sa femme, son homme ou ses gosses).
- Peut être apparaître assez rigide… surtout pour un HS dur !
- Être écouté est son eldorado, son fantasme, pour lui qui écoute si bien les autres… (c’est pour ça que je l’adore)
- Se demande ce que pense les autres dans leur tête, mais n’osera jamais leur demander !
- Ressent un attrait particulier, comme beaucoup passé 40 ans, pour le développement personnel, la méditation, le yoga, les accords toltèques, tout ce qui peut l’aider à être lui mais dans la douceur.
- Quand il s’exprime, est traversé par des questions perturbantes : vais-je être pris au sérieux ? Je vais lui faire perdre son temps, je ne sais pas exprimer mes pensées, etc.
- A dû mal à s’exprimer et a la certitude d’être handicapé de la parole. Envie les gens qui s’expriment facilement. S’en veut beaucoup de cet handicap (qui n’en est pas un, c’est de la peur et la peur n’est pas un handicap, mais il ne cultive pas la compassion à son égard)
- Se sent angoissé par les nouvelles de la planète. Sélectionne ses sources pour ne pas ajouter à son anxiété. Parfois ferme le robinet (passé 35 ans. Les plus jeunes ne l’ont parfois jamais ouvert).
- Tombe rarement en folie : bipolarité, alcoolisme, addictions, hôpital psychiatrique ne sont pas ses parcours favoris, il reste calme et précautionneux. Sa carapace fonctionne. Sa vraie souffrance est de ne pas être lui.
- Il ne sera jamais asperger ou avec des syndromes autistiques, car sa puissance est (pour l’instant) niée et parce qu’il est intégré.
- Pourra être salarié longtemps, contrairement au HS dur mais souffrira de ne pas être lui, de l’ambiance, de l’absence de sens.
- Se mettra à son compte avec pas mal d’appréhensions, mais in fine, après sa crise (soft en général car il tient), finira petit à petit par y aller.
- Je pense que sa puissance prend toute son ampleur dans des métiers “énergétiques” : ostéopathie, massages, yoga, somatopathes, énergéticiens… et pleins d’autres métiers évidemment, souvent nécessitant écoute, douceur et énergie intérieure. Mais je n’ai pas encore tout vu !
C’est un profil que j’aime beaucoup parce qu’il est bienveillant et à l’écoute. Il représente une forte part de mes clients. C’est un rayon de soleil.
Ses enjeux pour avancer
- Il a besoin de comprendre pourquoi il s’est effacé. Il se juge. Il a honte de son effacement. Or son effacement s’explique de façon toute à fait logique. Il doit comprendre le pourquoi pour se pardonner.
- Il a besoin de comprendre, comme tous les hypersensibles, pourquoi il a vécu toutes ces situations écrasantes, blessantes, malmenantes. Il lui faut donc reprendre des situations de son passé et analyser ce qui s’est vraiment passé, et pourquoi. Il ne pourra pas en faire l’économie mais ça peut être rapide. Il peut avoir besoin d’aide pour cette relecture car seul, c’est compliqué d’inverser la perspective.
- Il a besoin de prendre confiance dans sa puissance intérieure. Il n’ose pas sortir des étapes, règles, processus, détails car il pense qu’il en a besoin. Il ne s’est jamais autorisé à faire sans. Il a des forts ressentis intérieurs, des intuitions, des supers courts-circuits mais il n’ose leur accorder crédit. Il a besoin d’inverser la réaction et d’expérimenter la puissance qu’il y a en lui, en live.
- Son frein principal : le statut quo. Il n’est pas en souffrance extrême comme le HS dur. Il peut donc retarder le moment de travailler sur lui. Il peut aussi ne pas reconnaître sa souffrance puisque l’intégration est satisfaisante jusque là et que officiellement, il a envie de dire que tout va bien. Au fond, il sait que ce n’est pas vrai. Mais il a du mal à le reconnaître. Parfois, et même souvent, le travail commence sans qu’il ait eu besoin de reconnaître sa souffrance, parce qu’il veut lancer son activité et que ses démons l’empêchent d’avancer . Alors là, il est ok pour travailler… et dans ce travail, il contacte sa souffrance, pour son plus grand… soulagement.