Dans cet article, je parle d’un sujet totalement anecdotique : pourquoi il y a des lecteurs qui aiment me lire, et d’autres qui trouvent que ce que j’écris a une forme un peu prétentieuse.
Je l’ai dit, c’est un sujet con, mais j’aime bien imaginer des profils par croyances communes, un peu comme en droit, on extirpe le critère déterminant des expériences de la vie pour en trouver le fondement. Et j’adore, j’avoue !
Ma nièce, j’en ai déjà parlé, est quelqu’un de chouette. Elle m’accueille pleinement quand je suis triste. Elle me fait des hugs, ce qui fait beaucoup de bien. Et on se le rend bien, chacune à son tour (elle a 36 ans, je la cueille pas au berceau).
La semaine dernière, elle m’a proposé un coaching. On avait fait dans son sens. Elle m’a proposé de partir sur mon blocage à moi.
Je lui ai donc parlé de comment mon activité pouvait passer par des hauts et des bas, uniquement dans ma perception (comme moi, c’est mon petit côté bipolaire), et comment j’aimerais savoir où est la vérité.
Le coaching commence, et je suis bombardée de questions. Mais, je sens qu’elle veut me faire dire quelque chose qui ne vient pas, malgré ma bonne volonté. Plus précisément, je sens qu’elle attend de moi que je lui dise que quand j’écris, une part de moi veut convaincre et obtenir reconnaissance des autres.
J’essaye de me projeter, mais je n’arrive pas à ressentir cette quête au moment de l’écriture (et pourtant, la quête de reconnaissance, c’est toute ma vie, mais là, non). Sinon d’ailleurs, je n’y prendrais pas plaisir et ce serait injonctif peut être, et sans nul doute chiant à lire. Comme mes posts sur Facebook !!!
Au vu de son insistance à me faire dire un truc que je ne ressens pas, je lui ai proposé, plutôt que me forcer à dire un truc que je ne ressentais pas, de cracher sa valda.
Elle m’a dit alors qu’elle trouvait mes textes prétentieux. Ouarf. J’ai encaissé. Ce n’était pas purement désagréable, mais c’était perturbant. Et inquiétant, car ça ne tiltait pas en moi. Et je me suis demandée si je n’étais pas dans l’illusion, utilisant l’écriture pour compenser mes blessures (en bonne petite HS que je suis), histoire de m’éviter d’y aller.
Confirmation / Infirmation
Sous le choc (toute proportion gardée), j’essaye de trouver d’autres sons de cloches pour confirmer avant que je remette en cause mes perceptions de moi-même. J’écris donc à sa sœur, ma 2è nièce donc, et je lui demande : dis donc, est-ce que tu trouves que blablabla ?
Elle me répond : grave pas, t’es convaincue, c’est ce qui te rend agréable à lire, et puis ça résonne grave.
Ok. Je demande à Christine qui est LA copine que je ne vois jamais mais qui est fiable : non pareil, ça fait sens pour elle.
Mystère… Et pourtant ma nièce, je lui fais grave confiance.
Puis, me revient alors qu’il y a quelques mois, mon ex m’a reproché cette certitude aussi dans mes écrits. Comme si effectivement, j’étais donneuse de leçon alors que je n’étais pas exemplaire, ce qui est encore une autre question.
Introspection
J’ai essayé de chercher s’il y avait une part de moi qui voulait me mettre en avant, ou plutôt, dans le sens où elle le disait, s’il y avait en moi un côté donneur de leçon, genre « j’ai tout compris ». Mégalo quoi.
Me mettre en avant, non, je ne crois pas.
Mais « j’ai tout compris », il y a probablement quelque chose de cet ordre là, genre : oh la vache, regardez les mecs !
Parfois c’est une colère première (face à la matrice) qui me pousse à écrire. Et peut être que le ton est alors bien démonstratif. Vindicatif peut être. Mais parfois, j’avoue, je ne suis pas en colère. Je trouve juste excitant de partager ce que je comprends.
Bon alors, pourquoi ça lui pose autant souci à elle (et à lui) et pas à d’autres ?!
Ce qu’il faudrait
Ma nièce m’a indiqué le ton qu’il lui faudrait pour qu’elle ne soit pas agacée par cette lecture : plus de peut-être, des « je crois », ou des « pour ma part ». Plus de vulnérabilité aussi. En quoi je souffre.
Puis elle m’a dit que oui, elle me lisait, mais qu’elle ne me likerait jamais, ni ne partagerait mon article. Le ton du texte l’énerve trop.
Ce retour a été marquant. Car j’ai compris pourquoi ça matchait pas sur Facebook. Sir Facebook, les posts qui fonctionnent sont très personnels. Souvent un peu bisounours d’ailleurs je trouve. Et ok, plus on donne de soi personnellement, plus on récolte de likes et de partages. C’est normal.
NB : ceci dit, c’est facile de donner de soi à distance, se montrer dans son intimité et dans son coeur, mais qu’en est-il en face à face ? Je suis bien curieuse de savoir qui est capable de vraiment donner de soi aux autres quand il n’y a plus d’écran en protection, sans gérer son image, sans positiver, en disant vraiment ce qui est… Bon, c’est une toute autre histoire 🙂
Alors pourquoi je ne donne pas de personnel dans les articles ? Je crois que j’en donne. Mais mon but, c’est plus de démontrer ce que j’observe que de raconter ma vie. J’avoue. Les émotions, j’en ai assez dans ma vie perso, la vérité, c’est plus trippant. Je dirais jouissif. Ce qui me fait penser la sensation quand on lit une citation.
Il y a quelque chose d’hyper trippant dans une citation. Ce n’est pas une démonstration. Il n’y a pas de faits. Il n’y a pas de histoire personnelle ou de vulnérabilité. Il y a juste une évidence qui s’impose à nous dans toute sa simplicité. Et on ressent vraiment ce « c’est çaaaaa ».
La vérité des citations, celles qui résonnent pour nous, est jouissive.
Peut-on s’embarrasser de personnel, de peut être, de je crois, de pour ma part quand il s’agit de donner ce fond évident en soi ?
Sentir la vérité
Donc oui, démontrer, ça peut sans doute paraître mégalo si ce qui est dit ne résonne pas…
Je parle de sentir profondément dans ces tripes ce « c’est çaaa ».
Et c’est là où la frontière apparaît. Enfin la séparation des profils. Comme on dit en droit, le critère déterminant.
Ex et B / Rationalité vs ressenti
Ma nièce voudrait plus de doutes, plus des hypothèses que des certitudes qui viennent d’on ne sait où.
Ca m’a rappelée alors deux discussions que j’ai eues : une avec mon ex, et une avec B. Les deux sont très rationnels, et quand je dis rationnels, c’est une question de survie (apparemment).
Tout ce qui vient titiller ce postulat en eux est plus ou moins une menace. Menace à laquelle ils répondent parce que les rationnels mentaux de tout poil aiment utiliser : une gentille condescendance. Bref, la position de leur égo est stable : si ça contredit leur rationalité, c’est pas bon (parce que sinon tout est possible, or tout n’est pas possible).
Dans ces discussions, on en vient toujours à cette question qui m’est posée : pourquoi suis-je si convaincue, y compris sur des sujets où je ne connais rien ou pas grand chose ?
Moi je dis convaincue, eux disent « sûre de moi ». Ma réponse : parce que je le sens. Ce qui n’empêche pas que je puisse avoir tort, mais personnellement, je ne me pose pas la question, car so what ? Je sens ce que je sens, c’est tout. Et j’y accorde crédit, surtout quand c’est un sujet extérieur à moi, donc non parasité par mes émotions.
Je peux changer de position. Par exemple quand je vote Mélenchon après avoir voté Macron. Mais tout reste vrai. Seules mes priorités peuvent changer.
Eux de leur côté émettent des hypothèses et choisissent l’hypothèse la plus probable. La plus rationnelle. De façon analytique.
La question de sentir ce qui est bon, juste ou vrai ne se pose pas. Tout est à analyser, avec ce mini truc qu’est notre cerveau.
Ils développent alors en même temps, et du coup, une sorte d’obsession de la validation de ce qu’ils disent.
Et si je ne suis pas d’accord avec eux, c’est que je suis contre eux.
De mon côté, je suis sans aucun doute démonstrative, mais le fait qu’ils achètent ou pas n’a pas beaucoup d’importance. Le seul risque, c’est que je m’impatiente. Ou surtout que je m’ennuie.
L’impatience, elle vient du fait qu’il n’y a pas beaucoup d’énergie dans les mots qui viennent uniquement de la rationalité.
Contrairement à ces discussions magiques avec quelqu’un où soudain on va avoir l’impression d’être « plus intelligent » que d’habitude, alors même que l’autre pense différemment (sans doute parce qu’on creuse dans la même direction), là c’est juste prévisible, stérile et parfois vindicatif. Ca tourne en boucle. Dans le sens où on peut poser éternellement les mêmes hypothèses, les solutions sont infinies.
Puis, les discussions se finissent avec ce dialogue : « Gwenn tu veux toujours avoir raison ! » « Mais je vais pas dire pareil que toi pour te faire plaisir » « Non, mais tu refuses de changer d’avis » « Mais pourquoi il faudrait absolument que je change d’avis ? » « Ben parce que tu ne peux pas être 100 % sûre de ce que tu dis » « Mais je le sens, c’est tout », etc.
Donc nous avons des deux profils :
Ceux qui ne comprennent pas qu’on puisse avoir des certitudes ou en tout cette pure sensation d’être dans le vrai, eux qui résonnent tout par hypothèses, et ceux, beaucoup celles j’avoue, qui ressentent ce qui est juste et entrevoient qu’on puisse accéder à une vérité sans en maitriser tous les faits et aboutissants.
Je précise que je ne mets ma nièce nulle part, parce que selon les jours, elle peut être à un endroit ou un autre. En revanche, j’y met de façon certaine la plupart de mes ex, mon frère, l’autre frère, et maintenant que j’y pense, je crois que j’y mets une bonne partie des hommes que je connais 😂
Je mets dans l’autre case : les filles de ma famille, et bon, pleins de gens que j’accompagne. Ma mère aussi, bizarrement. Car elle a cette incroyable force d’être capable de changer d’avis, ce qui la rend réceptive à tout. Alors qu’elle est tant en contrôle de tout…
Postulats des deux profils
Pour les premiers :
- On ne peut avoir de conviction sans connaître (et démontrer) parfaitement le sujet (bonne chance à eux quand les spécialistes se répartissent en plusieurs écoles opposées)
- Une problématique se traite par la construction d’hypothèses. Ensuite, on essaye de voir rationnellement quelle est la bonne (ça dure des plombes et au final, on se retrouve sans réponse claire car la solution dépend des valeurs et des priorités).
- Ressentir « ce qui est est » est disqualifié par avance.
- Les enfants qui sortent toujours la vérité de leur bouche est donc une arnaque.
- Einstein n’a pu ressentir la solution avant de la démontrer. Il a trouvé après de longues journées de labeur à chercher (quoi, sans doute alors ne le savait-il pas, ben bon courage pour chercher alors).
- Je sens bien que mon avis est fragile (puisque je ne le « sens » pas), d’où ma quête de validation, mais à force de tourner mes hypothèses dans ma tête, je vais bien arriver à une conclusion qu donner le sentiment d’être pas trop débile.
- Si tu ne penses pas pareil que moi, tu es donc contre moi.
- La discussion est un mode combat, la question de qui va gagner est au coeur du débat.
- En vrai il n’y a jamais de gagnant lais que des perdants, puisque les deux avis ne se rencontrent pas. C’est comme se parler à travers une vitre.
Pour les deuxièmes :
- On peut sentir la vérité.
- On n’a pas besoin de connaître totalement un sujet pour « sentir » ce qui est juste.
- Le ressenti n’est pas dans la tête, mais quelque part dans le coeur.
- Il y a peut être bien un plug ici avec une vérité plus générale, voire cosmique, mais bon, j’insiste pas.
- D’ailleurs ça fait une sensation agréable à cet endroit quand quelque chose est juste. Marianne a des frissons. Moi des guilis dans les jambes, et vous ?
- Du coup si je ressens cette sensation quand il s’agit de mes propres pensées, je leur fais confiance.
- Je ne peux pas tout justifier, mais ça n’a pas d’importance.
- J’arrive à prendre des décisions rapidement quand elles sont basées sur cette sensation.
- Quand je ressens, j’observe qu’une partie des gens ressentent pareil que moi, avec pleins de variations
- En échangeant, on arrive à sentir ce qui est encore plus juste et plus exacte, et c’est génial.
- On est tout content à la fin et on a l’impression d’être plus intelligent après qu’avant.
Voilà 🙂
Dans l’autre partie, comment repérer l’interlocuteur avec lequel on va se sentir plus intelligent !!