Cet article parle de la relation à l’autre et du système dans lequel on peut rentrer parfois, au gré de nos amitiés ou rencontres.
L’histoire d’origine est venue au cours d’une rencontre du groupe Compagnonnage. Une des participantes racontait combien elle se sentait mal à chaque fois qu’elle mangeait avec une copine, sans en comprendre la raison. Elle nous explique un peu ce qu’elle ressent pendant ce déjeuner traditionnel, et son partage me rappelle alors bien des relations du passé, parfois encore en cours, même si ça ne dure plus longtemps à présent (la conscience monte plus vite !).
Dans ces amitiés, je me sentais mal et je culpabilisais de me sentir mal. En vérité, je me sentais même carrément nulle de pas me sentir bien 🙂 Rétroactivement, après avoir coupé les liens, j’ai réalisé de plus en plus clairement, et pour chaque relation coupée, qu’il se jouait un système que j’avais refusé de voir. Et le système se joue à deux. Le vrai sujet, me concernant, c’est mon aveuglement, pas l’autre !
C’est ce dont nous allons parler dans cet article.
Quoi que nous ressentons dans une relation
La première chose à assumer dans une relation, et c’est facile à dire, beaucoup plus dur à créditer, c’est que ce que nous ressentons, est vrai. Même si nous ne savons pas pourquoi. Nous ne savons pas la raison du ressenti, mais quand il est là, il parle d’un existant.
Oui ça paraît évident comme ça, mais je suis sûre qu’il y a dans votre entourage une relation dans laquelle vous n’êtes pas totalement bien mais que vous maintenez malgré vous, non ? Etouffant votre ressenti car vous ne lui donnez pas crédit…
Quand nous sommes mal avec quelqu’un, c’est qu’il y a une cause. Elle n’est pas conscientisée, souvent. Elle ne se calcule pas objectivement. d’accord. Mais elle est là, et elle opère énergétiquement, cette cause. Nous la ressentons dans notre corps.
Quand quelqu’un exerce un pompage énergétique sur nous, notre corps nous le dit.
Le pompage énergétique est l’activité principale humaine. Récupérer un peu de pouvoir, d’amour, de valorisation, et il n’y a que deux façon de le faire : soit en douce, soit ouvertement.
Ce pompage énergétique, il se fait à deux. Le pompeur et le pompé.
Nous représentons une serrure, et il y a une clé en face qui se réveille en notre présence (on part du principe que nous sommes dans cet article le pompé, mais ça peut être vrai dans l’autre sens).
Le moteur pour le pompeur est généralement en lien avec la valorisation. Et elle passe par sa propre valorisation, et beaucoup par la dévalorisation de l’autre. Le jeu est subtil, souvent inconscient. Ce sont des postures, et le signifié est toujours implicite.
L’enjeu de ce pompage en douce, c’est que ça ne doit jamais être frontal (donc attaquable). C’est comme une opération en sous-main, qui ne serait jamais dite ni assumée. En signifiant sans dire clairement, on exerce un pouvoir subtil sur l’autre, sans qu’il le conscientise clairement. Moins la cible écoute son ressenti, terrorisée qu’elle est de se tromper et de mal juger l’autre, plus elle sera sous emprise. C’est ainsi.
Les hypersensibles sont une cible de choix car ils ne font pas confiance à leur ressenti, ce qui est déjà un bon point pour les pomper en douce. Ils ont aussi ce côté bisounours, assez agaçant (et je suis la première concernée) à ne pas voir qu’il y a combat, alors qu’il y a combat. Ce côté bisounours les empêche de reconnaître les systèmes quand il y en a, et leur dire éventuellement merde (au système, au pompeur).
Nous pouvons rencontrer ainsi des relations qui durent des années, toxiques depuis des années, que nous n’arrêtons pas car quelque chose nous y attache. Et surtout parce que nous nions notre ressenti.
Dans le cas de Héléna, voici les quelques manifestations que nous avons pu débusquées pendant notre séance de groupe.
Comment ça se passe au déj d’Héléna ?
Dans une relation toxique, par une amitié entre filles, on peut retrouver des éléments assez typiques. Par exemple ici, votre copine :
- vous raconte toujours ce qui va bien, jamais ce qui ne va pas (contrairement à vous)
- vous inonde de tous les trucs supers qu’elle a fait, ce weekend, cet été, etc.
- ne vous écoute pas vraiment quand vous l’écoutez si bien
- ne vous pose jamais de question sur vous, ou rapide et zappe la réponse, ne rebondit pas, ne s’intéresse pas
- a besoin de vous mettre dans des cases, de vous circonscrire
- a tendance à vous dire comment vous êtes, à sortir des généralités sur vous
- a des commentaires étiquetants ou condescendants quand vous lui parlez de vous
- Plus difficile, semble vous respecter… mais pourtant vous ne vous sentez pas respectée !
- Vous vous sentez en forme avant de la voir, vidé(e) ou déprimé(e) après
- Vous êtes de plus en plus angoissé(e) à mesure que le temps en sa présence passe.
- Vous avez des amis/un conjoint qui lui ressemblent et qui ne l’aiment pas (eux captent, pas vous)
Depuis que je suis ado, j’ai toujours fait attention, en racontant mes weekends ou vacances, de ne pas gêner l’autre, de ne pas le rendre triste, quitte à moins en dire. C’est un truc d’ado car la question se pose beaucoup moins quand on a passé 40 ans, ok. Mais néanmoins, on peut se poser la question : mon interlocuteur fait-il attention à ne pas me rendre triste ?
Bref, ici, dans nos relations, nous offrons une serrure, l’autre à une clé. La seule chose qui importe, c’est, dans ce moment là, sommes-nous capable de le voir et ensuite, décidons-nous d’arrêter le pompage énergétique, ou pas ?
Donner sa sensibilité, et réciproquement ?
Dans ce type de relation, l’autre n’est pas capable de nous donner ce que nous lui donnons. Il ne peut s’empêcher de prendre (votre sensibilité, votre présence, votre écoute), mais il ne peut donner la sienne.
Il bénéficie de notre sensibilité, mais il n’arrive pas à être dans la sienne. C’est déjà un premier point. Et l’on peut l’observer dans les relations qui nous questionnent : suis-je pleinement écouté(e) ? Accueilli(e) dans cette relation ? Souvent non. Quand on est hypersensible, on écoute mieux les autres que les autres ne nous écoutent. D’ailleurs ils viennent nous voir quand ils sont mal, et puis parfois moins quand ça va mieux.
C’est ainsi. On peut décider de faire le tri… ou non. Mais il n’y a pas encore à proprement parler de système. Juste la frustration de ne pas être bien écouté 🙂
Là où le système commence, ce qui n’est pas le cas de toutes les relations où nous manquons de présence, c’est quand il y a une part en l’autre qui ne peut s’empêcher d’appuyer sur nous pour se valoriser ou se sentir en pouvoir. La posture ne nous valorise pas. Un malaise commence à pointer le bout de son nez dans notre corps. Le système démarre.
On peut le repérer à la façon dont on se sent après : Angoissé ? Triste ? En doute ?
Ou au contraire heureux, nourri, détendu, bien avec soi ?
Quand la relation devient toxique, un malaise particulier et flou se fait ressentir pendant, mais aussi après.
Le ressenti ne trompe pas. Ce n’est la faute à personne. Chacun fait du mieux qui peut, mais nous sommes pilotés par nos parts mentales et celles-ci peuvent avoir de fortes blessures narcissiques. Remettre un peu de baume sur nos blessures narcissiques en jouant dans la relation fait partie des stratégies de certaines de nos parts intérieures pour se sentir mieux. C’est ainsi.
La recherche d’éléments tangibles et l’énergie de l’intention
La question du ressenti est délicate pour les hypersensibles car nous sommes habitués à nous faire pomper. Depuis l’enfance. Donc nous ne voyons-plus quand nous sommes pompés. C’est une habitude.
Pourtant notre corps, notre cœur nous dit quelque chose. Mais sans plus d’éléments concrets, parce que nous cherchons des éléments tangibles pour étayer notre ressenti, parce que nous ne voulons pas suspecter pour rien, parce que nous aimons bien cette personne, nous le mettons de côté.
Or il n’y a jamais rien de tangible. Il n’y a que l’énergie de l’intention de l’autre, en arrière-plan, ses implicites, ses postures. Rien de tangible. C’est imparable et c’est la règle. Chercher le tangible est un piège. Seul compte le ressenti, le malaise…
Il est difficile d’accorder crédit à un ressenti qui nous dit que la personne serait dans un rapport de pouvoir, ou d’auto-valorisation avec nous (c’est pareil). Parce que nous la trouvons par ailleurs super, chouette, cool, etc.
Mais il faut comprendre que l’un n’empêche pas l’autre. Malgré toute sa bonne volonté, malgré son souhait d’être une bonne personne, notre interlocuteur est lui-même piloté par ses parts mentales et blessées en arrière plan. Une part peut avoir BESOIN d’exercer un pouvoir. Comme m’en parlait un client homme il y a quelques temps (et son honnêteté m’a scotchée proprement), une part « froide et calculatrice » s’éveille en lui chaque fois qu’il me voit et qu’il me sent ouverte et présente à lui. Ca le fait ch***, mais c’est plus fort que lui (et du coup, on a arrêté l’accompagnement, mais l’échange a été passionnant).
Comprendre que c’est l’énergie de cette part mentale que notre être profond capte, au delà des discours, des intentions honnêtes, de la bonne foi de l’autre, peut nous aider à mieux accepter le message de notre ressenti. Il ne s’agit pas d’accuser de malveillance. Il s’agit de se protéger des parts multiples de l’autre. Nous sommes multiples. Nous avons de multiples parts en nous. Et l’une peut piloter malgré nous, c’est ainsi.
Alors, que choisissons-nous ? Si le ressenti est juste, que faisons-nous de cette relation ?
ll n’y a pas de bonne réponse. Peut-être ne pouvons-nous pas fermer, là maintenant. Et c’est ok, tant que nous sommes en conscience avec ce qui se joue.
Mais une chose est sûre, quand nous ne fermons pas une porte pour nous respecter, nous empêcher une autre de s’ouvrir ailleurs. C’est mathématique…
La compensation, le doute et le flambeau
Nous allons rentrer un peu plus dans ce qui se passe pour notre interlocuteur.
Généralement, notre interlocuteur va utiliser notre sensibilité et notre ouverture pour compenser ses blessures intérieures (je ne suis pas assez, je suis seul, je ne suis pas puissant, je ne vaux pas le coup, je ne suis pas suffisant, ma vie ne vaut rien, je suis faible, je suis malheureux, etc.). Il pourrait, comme beaucoup d’hypersensibles, se confronter à ses doutes, en les voyant, en les exprimant, en s’en lamentant même, et en ressentant la douleur que génère ces doutes. Mais, sa stratégie est autre, et c’est un point important à comprendre pour les hypersensibles qui pensent souvent que tout le monde fonctionne comme eux : la plupart des gens ne veulent pas ressentir, voir, être en contact avec leurs doutes et leur souffrance. Ils feront tout, plus ou moins inconsciemment, pour y échapper.
Au mieux, ils maintiennent tout ça au chaud au fond d’eux-mêmes et font comme si tout allait bien. Au pire, une part en eux aura besoin de « reprendre le pouvoir » selon la personne en face d’eux, bref, de mettre du baume. Cette part ne pourra pas alors s’empêcher de « se faire mousser » face à l’autre. Et elle ne tente cette stratégie que quand l’autre peut y croire facilement, douter de lui facilement. Donc oui, l’hypersensible est une proie idéale, puisqu’il doute tout le temps (« tu te poses trop de question », etc etc) et croit facilement ce qu’on lui dit. Un enfant aussi est souvent une bonne proie. Car il est innocent… Il croit aussi ce qu’on lui dit.
Si la cible doute suffisamment, il est possible alors que le pompeur remporte (enfin !) le flambeau de celui qui sera plus (selon sa peur principale) : plus sûr de lui, plus cool, plus populaire, plus socialisé, plus fort, plus puissant, plus insouciant, ou plus carré, plus intelligent, plus verni, plus apprécié, plus successful, plus confiant, plus amoureux, plus, plus, plus.
C’est comme remporter la palme de la vie parfaite sur Instagram : à défaut que ce soit vrai, le fait que les autres y croient apporte un super soulagement, ça fait carrément du bien (ça suffirait presque même s’il y avait pas ce petit pincement régulier dans les heures perdues qui donnent envie parfois de mettre fin au simulacre une bonne fois pour toute…).
La soulagement temporaire
Je reviens sur le pompeur.
Cette stratégie est une stratégie de compensation face à une blessure narcissique ou en tout cas face à la peur larvée d’être insuffisant. De n’être rien.
Qu’est ce qui se passe dans ce phénomène de compensation ? Une part de notre interlocuteur (je précise bien une part, au fond, c’est un prince ou une princesse…) va essayer de calmer la tension de ses doutes ou blessures (dont il n’est pas bien conscient) en nous faisant douter de nous, en nous faisant ressentir ce que lui n’a pas encore eu le courage d’affronter, d’accueillir lui-même.
L’effet, c’est que ça génère un soulagement immédiat : dès que l’énergie du doute chez l’autre est perceptible, dès que l’autre se diminue, admire, se dévalorise. Bref, dès qu’il doute, le soulagement arrive. C’est physique.
Mais, le soulagement ne dure pas. C’est comme un rail de coke. Il ne fonctionne qu’en live et juste après. Puis il s’éteint. Jusqu’au prochain rail de coke.
La compensation est parfois une histoire de survie, pour ne pas exploser. J’ai souvenir de l’interview (réel) d’un sérial killer dans Mindhunter. Celui-ci disait que tuer le soulageait. Alors il essayait de tenir le plus longtemps possible, car il ne voulait pas tuer, mais à un moment, la démangeaison était trop grande, il avait besoin d’expulser cette énergie de destruction…
L’importance de le faire en douce
Dans ce jeu de pouvoir avec l’autre, il importe de faire douter l’autre sans s’exposer ouvertement (les serial killers aiment d’ailleurs jouer avec l’impunité, ne pas être attrapés, c’est humain, ça fait partie de la sensation de pouvoir). On fait donc sentir à l’autre (qu’il n’est pas assez, que sa vie n’est pas, etc.), mais sans jamais le dire clairement. Le jeu fonctionne par sous-entendus. Par l’implicite. Le ton de la voix, les tonalités de phrases, le regard, l’attitude corporelle. Le doute est instillé mais sans s’exposer.
Aucun élément factuel ne permettant de reproche clair, si on tente le reproche, c’est avec un flou qui enlève toute crédibilité (et autant vous dire que l’autre saura vous le faire sentir). La stratégie est logique, car l’implicite ne peut être combattu par le conscient.
Si le conscient captait direct l’attaque, il y répondrait directement et possiblement avec talent. Or rappelons-nous que l’attaquant a une blessure narcissique qui le rend sans doute incapable d’assumer une discussion franche et authentique, un débat rhétorique ou un conflit. C’est probablement un lâche, il ne peut passer que par les petites doses homéopathiques, discrètes, et inattaquables… L’attaque ne peut donc qu’être subtile. En douce.
Tout ça peut avoir l’air terrible, mais nous pouvons tous avoir à un moment une petite tendance manipulatrice. Je me rappelle que ça m’est arrivée une fois avec un ami de mon frère, Philippe. J’avais 21 ans comme ça, et j’ai profité de sa gentillesse pour lui faire sentir qu’il était insuffisant. Ca a duré 15 mn comme ça je crois, et après il m’a envoyé ch***. Il a bien fait. J’ai gardé ce moment comme un grand moment de honte. Et une bonne leçon d’humilité aussi. Parce qu’on le voit chez les autres, mais chez soi…
Celui-là, je l’ai vu. Mais j’en ai sans doute commis d’autres. Rien qu’avec mes enfants… J’ai souvenir de quelques moments « passif agressif » avec mes enfants où au lieu de me positionner clairement, j’ai joué la culpabilité, sans prendre de risques… Je n’étais pas capable de faire une demande claire ou de poser des limites à défendre ensuite. J’étais faible. Mon inconscient a géré. Et quand je me suis rendue compte après… j’étais pas fière.
Notre corps exprime tout
Nos refoulements nous pilotent, c’est ainsi. Quand ça a lieu à travers nous, il est difficile de s’en rendre compte. Quand ça a lieu en face, vous seul pouvez l’observer, et c’est votre mission.
N’ayez crainte, à la seconde même où un pompage énergétique se met en place, notre corps le sait. Il vous le dit. Instantanément. Et vous pouvez dans un sens vous en sentir flatté, car c’est probablement que vous avez une douceur, une humilité, une sensibilité intérieure, une innocence, qui active malgré lui votre interlocuteur. Tiens, un pigeon !
Comment votre corps vous le dit ? Vous avez soudain du mal à respirer profondément, vous vous sentez moyennement bien, anxieux, triste, nul, une contraction dans le ventre, parfois une apnée. Hop. Un système est en train de se monter, et vous avez encore la possibilité de lui dire bye bye.
Pompage énergétique ou complexe d’infériorité ?
Parfois, on ne sait pas s’il y a système (pompage énergétique) ou blessure, par un exemple un complexe d’infériorité.
Exemple : Vous vous sentez mal avec un pote, vous faites un complexe d’infériorité avec lui.
Un sentiment d’infériorité parle de toute façon d’une blessure en nous, qu’il y ait système ou non. Peu importe le pote, si vous vous sentez inférieur(e), vous avez un truc à travailler ici, et c’est le moment !! (venez me voir 😉 )
Maintenant, la question est de savoir s’il y a un système entre nous et lui : est-ce qu’il profite de notre sensibilité, ou est ce qu’il est clean mais que notre blessure s’active seule ?
Je ne peux m’empêcher de penser que quand nous avons ce sentiment d’infériorité, quelque chose est entretenu en face… inconsciemment, vaguement. Pendant la relation, nous n’en prenons jamais vraiment conscience, mais le recul nous permet toujours de capter des indices, rétroactivement, qui indiquent que le jeu n’était pas totalement clean. Et c’est ok. La question est : qu’en faisons-nous ? Que voulons-nous pour nous ?
Pour détecter si système il y a, demandez-vous si votre ami parle de sa vulnérabilité (doutes, émotions, enjeux, questionnements) comme vous. Si ce n’est pas le cas, c’est qu’il entretient son image. Rien de mal à ça, il ne veut pas regarder ses doutes. Mais vous n’êtes pas à égalité énergétique si vous n’entretenez pas vous aussi votre image vous aussi. Vous ne pouvez qu’être mal avec quelqu’un qui le fait. Et c’est votre responsabilité, pas la sienne. Lui fait ce qu’il peut.
Une autre façon de détecter si système il y a, c’est d’imaginer une autre personne ayant les mêmes attributs que votre interlocuteur, ceux qui vous semblent vous faire flipper en tout cas (intelligence, pouvoir, succès, beauté, etc. ), par exemple une personne connue ou un autre ami. Sentez alors si le malaise reste entier. Si oui, c’est qu’il est l’heure d’aller guérir cette grosse blessure 🙂 Si non, c’est qu’il se joue quelque chose de l’ordre du système.
Observer ce qui n’est pas dit clairement
Une autre façon de détecter le système est d’observer simplement ce qui n’est pas dit clairement.
J’ai souvenir d’un ami avec qui je suis partie plusieurs fois en vacances qui avait l’art de ne jamais dire clairement ce qu’il pensait. D’ailleurs, ce qu’il pensait semblait tellement jugeant que je peux comprendre qu’il n’osait l’exprimer !!! Mais ce que l’on n’ose pas exprimer à l’autre parle de notre propre compensation. Nous jugeons l’autre car nous avons quelque chose à régler à l’intérieur auquel l’autre fait miroir. Ce que l’on ne peut dire clairement à l’autre est suspect. Et ça parle de faiblesse.
Alors oui, dans notre société, peu de choses sont dites clairement, c’est vrai. C’est bien ce que je vous dit (et Krishnamurti avec moi), nous sommes dans une société malade !! Pourquoi pas. Observons-là, c’est plus rigolo que la subir.
Donc question : si vous vous interrogez sur la toxicité d’une relation, demandez-vous si votre interlocuteur vous dit clairement ce qui se passe pour lui ? Formule t-il ce qu’il ressent ? En fait-il l’effort ? Et si vous l’interrogez, ose t-il dire formuler, même si c’est flou ?
Et puis, vous formule t-il des demandes claires (ça, ça me va pas, quand tu fais ça, j’aime pas, peux-tu faire autrement, etc.) ?
Le manque de clarté est assez typique du pompage énergétique en douce. L’énergie de l’autre est retenue, elle absorbe la notre.
La demande non claire est assez typique quand nous nous retrouvons à nous justifier malgré nous. Cela arrive avec les relations proches, avec nos parents par exemple, ou notre conjoint, ou quelqu’un qui a une forme d’autorité. Hier, j’ai vu une cliente commencer à se justifier (au téléphone) à la question « Etes-vous mariée ? » qu’une fonctionnaire de la Chambre des métiers lui posait et on pouvait sentir l’implicite, la tentative de domination latente dans cette conversation. Je l’ai foudroyée des yeux (gentiment) dans l’instant, et elle s’est repris : non. Non point. Il y a eu un silence, forcément. Mais elle n’a pas craqué, elle n’a pas comblé le silence. Elle a laissé le silence se faire. Et est restée sur son non. C’était génial…
Quand nous nous justifions, il est intéressant d’aller voir si notre interlocuteur sous-entend par avance notre culpabilité, si les demandes sont claires ou si elles laissent à penser que…
L’implicite est mortifère
J’aimerais insister sur l’effet mortifère de toute énergie retenue, contrôlée. Là comme ailleurs, une énergie qui est contrôlée, a un impact beaucoup plus grand qu’une énergie claire, même négative. Le non-dit est un cauchemar quand on ne le conscientise pas. Car inconscient et conscient sont tiraillés, et notre inconscient se soumet à tout implicite qu’il ne maitrise pas consciemment. Comme un enfant.
J’ai souvenir de vacances ainsi avec un autre ami, un petit copain cette fois, où sa voix off contredisait en permanence ses postures « officielles ». Je me sentais souvent mal avec lui, et sans savoir pourquoi. Plus tard, nous avons découvert, et lui aussi car il était dans son propre tunnel, qu’il avait une voix off hyper flinguante en arrière plan, très jugeante, mais qui n’était jamais exprimée clairement. Il cachait tout… Sans doute de peur d’être une mauvaise personne. Ou peur de s’exposer aussi à un conflit. Peut être honteux aussi de la violence de ses jugements (j’ai découvert ensuite que pendant toute notre relation, il m’avait énormément jugée… sans en lâcher un seul morceau. Quel bonheur, cette découverte rétroactive :-/ Et quel enseignement…).
Mais tous ces non-dits se dégageaient. Moi en tout cas, je les percevais, mais de façon flou, sans comprendre. Et mes questions restaient toujours sans réponse. Non, non, ça va.
Même si l’autre croit nous éviter de sentir, on sentira quand même. Il n’y aura pas manipulation ou toxicité en ce sens, mais pour les plus sensibles d’entre vous, il y aura quand même un captage d’énergie contradictoire. Et donc malaise.
Pour un hypersensible (et pour un autiste aussi, ou un enfant), la différence entre ce qui est dit officiellement et le signifié implicite est beaucoup plus source de malaise que pour d’autres. Nous sommes coincés entre le conscient qui croit le discours, et l’inconscient qui choppe à fond l’énergie de la part mentale en action. Comme nous sommes sensible, nous absorbons totalement cette dernière. Mais notre conscient, notre mental y résiste. Puisque rien ne l’étaye. Vous imaginez combien il est logique qu’un état de panique puisse nous prendre à ce moment. C’est ce qui arrive à beaucoup d’adolescents. Et de jeunes adultes. J’ai eu moi-même mon moment de phobie sociale et de paniques relationnelles régulières… que j’ai traités à l’époque à coup d’alcool et d’anti-dépresseurs.
Mères et filles – Décharger l’autre de sa propre responsabilité
En résumé, ce qui est dit ou exprimé clairement peut être blessant, mais n’a jamais le même effet « absorbant » que quelque chose qu’on nous fait ressentir sans en prendre la responsabilité. Dans le 1er cas, la personne s’expose, l’énergie circule, même si c’est de la colère, vous savez à quoi vous avez à faire. Dans le 2è cas, l’énergie est retenue, vous vous sentez mal, sans bien comprendre pourquoi. Et souvent, vous vous soumettez, malgré vous (au jugement, à l’implicite).
J’ai remarqué que ce rapport énergétique était assez courant entre les filles et leur mère. La mère culpabilise la fille, de façon implicite, de ne pas s’occuper d’elle assez (pas assez d’écoute, de présence, d’aide). Mais non, non, ça va, c’est pas grave, vas-y, fais ta vie (je dois reconnaître que ce n’est pas le cas de ma mère, j’ai échappé à ça). La fille culpabilise de ne pas être assez présente (c’est le lot des enfants, la culpabilité) Elle donne de la présence, de l’écoute. Evidemment se sent mal (normal, ça marche pas, elle alimente le système de sa mère, c’est un puits sans fond). Arrête. Puis reculpabilise, puisque sa mère qui lui fait sentir à nouveau que. Re-aide. Etc. Si elle aide, son âme se cabre, c’est pas ok. Si elle n’aide pas, sa mère lui fait sentir qu’elle est coupable, ce à quoi elle ne peut même pas répondre clairement puisque c’est implicite. Coincée elle est 🙂
En fait, comme souvent dans les relations toxiques, l’implicite est une façon de ne pas se confronter à sa propre souffrance. On demande à sa fille d’être d’écouter notre décharge mentale comme on demande au thérapeute une baguette magique. En croyant aider sa mère, la fille déresponsabilise celle-ci de sa souffrance, elle lui allège transitoirement le fardeau. Mais une démarche de guérison ne commence pas avec l’autre. Ca commence d’abord par un sentiment d’humilité, et d’engagement avec soi-même face à une souffrance qui n’est plus fuie. Pas avec un colmatage en mode victime avec ses proches… Le colmatage recule le processus. Mais ça, c’est une autre histoire…
La meilleure solution à la relation toxique : le Shut down
Enfin, quoi faire dans une relation à système qui peut devenir toxique, c’est à dire nous appuyer sur la tête ?
Le shut down est le moyen le plus efficace pour couper court à un système.
Justifications, misérabilisme, accusations, jugements sous-entendus, tout ça est de bonne guerre, nous le faisons tous. Mais dès que vous vous sentez mal à l’aise avec votre interlocuteur, que les choses ne sont pas dites clairement, que vous vous sentez contraint, en tension intérieure, sans savoir pourquoi, dès que vous vous sentez en doute, dévalorisé, insuffisant, c’est qu’un pompage énergétique est en route et vous avez le pouvoir de couper l’alimentation.
Vous respirez, vous vous centrez, vous vérifiez que vous êtes ok avec votre besoin, et vous coupez l’énergie. Vous n’en mettez plus dans la conversation, dans la relation. Et ça devient très intéressant à observer. C’est là que vous découvrez que l’autre a besoin de votre énergie, de vos contre-argumentations, de vos justifications, de votre admiration, de votre culpabilité, de votre auto dévalorisation, de vos doutes, de vos émotions, de votre sensibilité, bref de tout ce substrat énergétique. Si l’énergie est coupée, il n’y a plus rien. L’autre reste alors dans sa propre tension. C’est comme une prise de judo. On vous attaque mais vous n’êtes pas là. Vous vous mettez de côté.
Concrètement :
- Vous arrêter d’expliquer, vous ne racontez plus, vous ne répondez plus, ou évasiment (ah oui, bien sûr, hum hum, tiens donc).
- Vous ne rentrez plus dans vos atermoiements personnels, votre culpabilité, vous ne partagez plus vos doutes, vos émotions, vous ne fournissez plus votre sensibilité en pâture, vous observez l’autre.
- Vous vous autorisez à clore la conversation à tout moment pour un motif quelconque (ah zut, j’avais oublié, je dois aller chercher ma fille, je suis fatigué, je vais me coucher, faut que j’y aille, j’ai un copain qui doit passer, etc.).
L’observation est un puissant outil. Il demande de se centrer dans sa respiration, d’accepter pleinement tout ressenti qui passe en nous (malaise, anxiété, hop, on prend, on respire), puis de regarder l’autre pleinement : ce qu’il partage, ce qu’il dit de lui, ce qu’il ne dit pas, et ses implicites corporels. Pratiqué 20 mn, c’est souvent édifiant…
Dans les relations d’emprise, donc très toxiques, il y a la stratégie du disque rayé que vous vous connaissez peut être. Tout ce que vous pouvez dire, exprimer, sera à charge contre vous et sera utilisé pour vous en rajouter une couche. Vous pensez expliquer pour que l’autre comprenne, mais la vérité n’est pas le but. Vous servez de catalyseur pour évacuer l’énergie. La meilleure façon d’arrêter le système en cours, est de ne donner aucun détail, aucune prise, mais de répéter la même phrase éternellement : je ne suis pas disponible maman ce vendredi. Oui mais je ne suis pas disponible ce vendredi, Hélas, je ne suis pas disponible ce vendredi, ah mais c’est dommage, il se trouve que je ne suis pas disponible).
Notre besoin et nos limites
Formuler notre besoin est une bonne façon de clarifier une relation, et d’en préparer la transformation ou plutôt la fin.
Quand tu me parles toujours que des trucs positifs, j’ai l’impression que tu ne veux pas partager le moins bon, et j’en ai besoin. Quand tu juges et que tu ne me dis rien, je le sens, et je préférai que tu me le dises. Quand tu ne réponds pas clairement à mes questions, tu me mets mal à l’aise et j’aimerais des réponses nettes. Quand tu me fais sentir que tu vas pas être bien si je viens pas te voir, je me sens coupable, peux-tu me demander clairement, je te dis oui ou non, et tu prends acte de ma réponse sans insister ?
Dire notre besoin, formuler une demande claire ne fera probablement pas changer l’autre car il veut pas prendre de responsabilité. Donc il niera. Se défendra. Accusera parfois.
Mais ce n’est pas grave. Le but n’est pas d’obtenir une réponse positive improbable ou encore mieux, un changement de comportement (c’est possible parfois avec une personne plutôt sensible, donc avec suffisamment de puissance intérieure). C’est une façon de se donner quitus. Nous l’avons jouer honnêtement et clairement. Nous pouvons alors (éventuellement) fermer la porte en conscience.
Et si nous n’arrivons pas à fermer la porte ?
C’est ok. Vous, ou votre inconscient, n’est pas encore prêt à signifier une rupture ou un positionnement clair, et c’est ok. Ca viendra plus tard. Respectez-vous. Vous êtes en cours de processus. Quand vous serez prêt à dire clairement non, vous le sentirez. Votre priorité en attendant est de ne jamais être en efforts. Car vous dilapidez votre énergie alors et vous le paierez. S’il faut mentir pour cela, c’est mieux que dire oui.
Et pus parfois, on dit oui en conscience, parce que voilà, c’est comme ça. Assumez-le. Respectez-vous. Vous n’êtes pas (encore) Jésus ou Ghandi. Profitez de cette expérience car elle est énergétique et fait bouger votre intérieur. La prochaine fois, vous aurez un petit coup d’avance 🙂
Merci pour cet article éclairant, qui résonne pour moi sous bien des aspects.
Je comprends qu’il s’adresse plutôt aux personnes « hypersensibles », néanmoins je crois que ce mécanisme est inhérent à toute relation et que toute relation contient ce potentiel toxique.
En tant qu’hypersensible, je me sens effectivement récipiendaire de ces mécanismes de compensation, de protection, de « pompage », tant de la part d’hypersensibles que de personnes moins spécifiquement identifiées comme telles.
Pour autant, j’ai conscience de pouvoir générer le même mécanisme toxique lorsque je me retrouve en déséquilibre énergétique, que ce soit en réponse à un « pompage énergétique » ou simplement en compensation de la blessure activée dans une situation donnée.
Il n’y aurait ni bourreau, ni victime, puisqu’il s’agirait du fonctionnement énergétique universel, une sorte de jeu qu’il est probablement grand temps de voir et de comprendre.
En ce qui concerne les pistes concrètes que tu évoques, à savoir « faire semblant de rien », « ne pas partager ses sentiments », « trouver un prétexte », je suis plutôt pour la vérité et la sincérité qui transparaît dans ton propos, à savoir l’expression des limites et des besoins.
C’est en tous cas mon expérience en ce moment : ne pas considérer la relation comme toxique, mais bien certains aspects. Identifier les conditions de la toxicité et pouvoir m’en prémunir en les évitant ou les refusant clairement, parfois en les dénonçant. Dans la plupart des cas, il ne s’agit donc pas de condamner la personne, encore moins de la catégoriser, mais bien de reconnaître, qu’à ce stade, pour le moment, je ne suis pas en mesure de relationner sainement et ouvertement comme je le souhaiterais dans ces contextes. Mais surtout, me positionner. Oser dire non. Assumer les conséquences. Laisser l’autre assumer ce qui lui appartient.
Et si la personne s’accroche, je suis désolé de ne pas être Jésus, comme tu dis, et de ne pas avoir la capacité de lui donner l’amour inconditionnel qu’elle demande (et si cela devient une condition à la relation, qu’elle exige) pour combler son manque d’amour-propre, pour panser ses blessures. Je ne peux que l’inviter, avec tout l’amour qui m’est accessible, de l’inviter à le faire.
Il s’agit là pour l’hypersensible, finalement , d’arrêter de « penser » à la place de l’autre, et surtout, d’arrêter de « panser » pour l’autre. Toute la subtilité et l’apprentissage réside dans l’équilibre à trouver, à chaque fois différent : la juste empathie, le bon accordage… et pour réaliser cet accordage, il convient de s’accorder soi-même, enlever les cailloux dans la caisse de résonance, ajuster les cordes, sans quoi l’improvisation avec l’autre a de grandes chances d’être scabreuse, voire néfaste. D’autant plus entre hypersensibles en fragilité ayant des enjeux contradictoires !